Lou ne voulait plus jouer à ce petit jeu-là avec Lyanna. La sorcière était une régente, après tout. Si elle le décidait, ne pouvait-elle pas lui faire regretter ses mensonges d'un simple claquement de doigts ? Louise n'avait pas confiance en Luka et doutait qu'il puisse la sauver du moindre sort. Il était grand-temps de mettre fin à leur jeu et de demander à la régente de sortir de l'établissement, sous couvert d'un manque de respect pour une sorcière inconnue, Lou, qui débarquait à Los Angeles sans se faire connaître des covens en place.
Évidemment, Lyanna n'apprécia pas les remarques de la blonde. Elle se braqua immédiatement et renvoya à la figure de Louise tous les reproches qu'elle avait à lui faire. Imperturbable, la serveuse se contenta de fixer son interlocutrice, un sourcil haussé presque par défi. Elle n'avait, évidemment, rien à répondre à tout cela. Elle ne voulait pas répondre à tout cela. Lyanna n'avait pas tout à fait tort dans ses accusations, mais Lou se faisait un devoir de lui faire que si, elle était dans le faux et qu'elle s'enfonçait un peu plus à chaque mot.
Lou faillit laisser échapper un sourire désabusé, qu'elle retint pour garder un visage fermé. Voilà qu'on lui conseillait, à elle, de ne pas mentir. L'autre Lou, lui, explosa de rire dans son crâne. Louise se faisait un besoin vital du mensonge, de la tromperie, de la manipulation. Ce n'était pas une régente, croisée au hasard dans Los Angeles, qui allait la pousser à vivre autrement. Toute sa vie n'avait été rythmée que par cela : les mensonges. Petits, grands, inoffensifs, dangereux. Toute sorte de mensonges. Alors Lou se fichait bien qu'on lui conseille de vivre autrement. Elle ne voulait pas vivre autrement.
La brune, sûrement soûlée par le comportement incompréhensible de la blonde, décida de partir. Lou avait presque envie de lui dire que c'était bien trop drôle, de mentir, pour qu'elle n'essaie pas, en voyant débarquer Lyanna, de se faire passer pour ce qu'elle n'était pas. Mais elle se retint, un petit sourire commercial accroché aux lèvres, et regarda la régente se diriger vers la porte. Quand le carillon sonna par l'ouverture de la porte, Louise hocha la tête et lâcha, d'une voix douce :
« Merci, bonne soirée*. Et à bientôt. »
Lou se bidonnait comme un fou face au "professionnalisme" de son hôte, tandis que Louise détournait déjà son attention de la porte pour regarder le chat noir, sur le comptoir. Avait-elle fait exprès d'amener une régente dans l'établissement ? La question tournait dans son crâne sans qu'elle n'arrive à lui trouver une réponse. Luka était prêt à crier que, sous sa forme de chat, Félicia n'était plus rien qu'un chat, mais Louise en doutait. Il brillait une intelligence, au fond de son regard, qui la laissait croire que la sorcière était bien consciente de tout ce qu'il se passait autour d'elle. D'ailleurs, en étant rangée dans la catégorie des "familiers", elle devait bien être maître de son propre corps.
Ce constat effraya Lou, qui couina dans son crâne et essaya de la persuader que non, mais Louise le renvoya et alla fermer la porte à clef. Elle devait ranger à nouveau, après le passage de Lyanna, et elle préférait, cette fois, s'assurer que personne d'autre ne vienne interférer avec la fermeture du Béni-boui-boui.
Fin.