Heure d’affluence, les gens se bousculent dans les rues de Los Angeles. Keon se noie, disparait dans la masse. Il occulte comme il le peut les voix qui susurrent à son oreille, qui demandent de l’aide. Et lui ? Qui vient donc le secourir ? Il n’a pas choisi de sortir à cette heure-ci par hasard, il veut profiter de cette foule mouvante pour faire ce qu’il a toujours fait pour survivre : voler. Certes aujourd’hui il y a un travail, même deux. Juste de quoi payer les factures, le loyer, de la nourriture en maigre quantité. Mama Loraye certifie que manger rarement augmente le plaisir des aliments retrouvés.
Et Keon boit les paroles de sa compagne… Naïf jusqu’à la moelle.
Il se faufile dans la boutique de jeux vidéo à la suite d’un client qui ne l’a pas remarqué, il lui est si facile d’être invisible à force de côtoyer les fantômes. Pourtant avec son allure de clochard pourrait quelque peu attirer le regard. Son parka déchiré rafistolé au ruban adhésif, ainsi que ses chaussures dont les trous sont colmaté par ce même matériau. Malgré tout, Keon n’a pas d’odeur pestilentielle d’homme de la rue. Il a bel et bien un logement et dispose d’un douche dont il fait usage quotidiennement, il ne peut pas se permettre d’être crasseux et aller faire le ménage dans un hôtel de luxe ou d’aller au contact de clients pour livrer des fleurs. Par ailleurs, des fleurs c’est bien ce qu’il a dans les mains. Il se fraye un chemin jusqu’à la caissière occupée avec un client. Ses yeux se baladent sur les étagères avec curiosité et intéressement. Sa petite Game Cube tombe en panne tous les quinze jours et il la réanime tant bien que mal pour pouvoir continuer à profiter des quelques jeux en sa possession qu’il fait encore et encore. Il a découvert les jeux vidéo chez Jacob il y a trois ans et demi, après avoir été égorgé par Coco Mambo et revenu d’entre les morts grâce à Lwa Papa Legba avec qui, il aura bien encore à faire plus tard…
Quand l’homme parti avec son achat, Keon affiche un sourire à l’attention de l’employée, creusant d’avantage ses joues en étirant ses traits fins.
- Bonjour, c’est pour vous et il faut signer ici.
Pour elle, sa patronne ou une autre employée, qu’est-ce qu’il en sait ? Il lui tend son petit carton de réception pour avoir la signature. Ce n’est pas par hasard qu’il termine sa tournée ici.
Le médium n’a pas grand-chose à perdre. Son regard s’attarde sur une bonbonne d’oxygène sans qu’il se cache ce que c’est, il n’en a jamais vu et ça lui fiche un peu les jetons un truc pareil, est-ce que ça explose ? Il n’en sait rien, mais il aime autant garder ses distances, on n’est jamais assez prudent, ça serait dommage de ne pas vivre assez longtemps pour faire avaler à sa Game Cube le “nouveau” Zelda… Oui, parce que cet opus date de 2006. Keon s’est passionné des jeux, ça l’aide à s’évader, à ne penser à rien, à faire le vide tout simplement. Quoi de plus jouissif quand on a le cerveau qui tourne sans cesse à cent à l’heure ? C’est assez merveilleux que d’être suffisamment focalisé sur quelque chose pour pleinement faire abstraction des voix des esprits qui le harcèlent.
- Hey, mais faites gaffes !
Qu’il rouspète avec ce fort accent Canadien, deux clients vraisemblablement pressés viennent de le bousculer sans se retourner pour accéder dans un autre rayon. Pourtant, on ne peut pas dire que le médium prenne beaucoup de place, maigrichon comme il est ! Il ne garde cependant pas longtemps son adorable mine contrariée, rayon de soleil dans les ténèbres d’une vie aussi lugubre que la sienne.
Keon reporte son regard vers la brune :
- C’est un très joli bouquet qu’on vous a offert, pour sur la personne ne se fout pas d’votre gueu…
Trop familier… Trop d’éducation à revoir, à refaire.
† The Legend of Zelda: Twilight Princess I'm wasting my young years. It doesn't matter here I'm chasing more ideas. It doesn't matter here baby I'm wasting my young years.
"Non, la Wii n'est pas une console rétro. D'ailleurs c'est pas une console du tout, si vous voulez mon avis." Juno a l'air blasé. "Non mais y a bien des gens qui ont essayé de vous en vendre...""Ils ont essayé, mais on ne l'a pas prise, puisque ce N'EST PAS une console rétro. Pas encore en tout cas. Et c'est pas plus mal." Le client la regarde de haut, l'air vexé qu'elle lui réponde ainsi et ne courbe pas l'échine face à son caprice. Caprice qu'elle n'aurait de toute façon pas pu satisfaire, puisqu'ils n'en ont pas, de putain de Wii. "Franchement vous êtes pas très commerciale.""Ouais, on me le dit souvent. Et encore, vous n'avez pas vu mon patron, il vous aurait foutu dehors rien qu'à l'énonciation de la Wii. Mais moi j'suis gentille, je vais plutôt vous conseiller d'aller chez Game Force ou World-8. C'est plus moderne, ils auront peut-être ce que vous voulez. Mais honnêtement en 2020 à part sur internet..." laissa-t-elle en suspens. Le mec soupira, acheta quand même le jeu de PS2 qu'il avait dans la main, et finit tout de même par la remercier avant de sortir du magasin. Connard.
Un gars, encore plus mal fringué que Juno, se pointa devant le comptoir avec un bouquet de fleurs. La jeune femme haussa un sourcil en examinant le bouquet d'un air sceptique. "Bonjour..." Ses lèvres se pincèrent entre elles lorsqu'elle prit le petit carton, elle attrapa un stylo et signa rapidement avant de rendre le carton au jeune homme. Elle lui prit le bouquet, pour le débarrasser, et regarda vite fait autour d'elle avant de le poser sur un carton derrière elle. Ca devait être pour Lola, qui était déjà repartie. Tant pis pour elle. Son regard se posa quelques secondes sur les clients qui venaient de bousculer l'inconnu, dans l'idée de les surveiller, mais elle reporta vite son regard sur le livreur. "C’est un très joli [...] d’votre gueu… C’est un très joli bouquet." Un sourire se dessina sur le coin des lèvres de la jeune femme, qui avait maintenant un air légèrement moqueur. "Ouais, c'est pour ma collègue. C'est son anniversaire demain, et son copain lui en envoie tous les ans. Sauf qu'aujourd'hui elle bosse pas, alors je vais les mettre dans de l'eau, mais bon... Je suis pas sûre de la tronche qu'elles auront demain." Juno avait été éduquée, elle. Mais elle n'était pas assez soucieuse du paraître pour faire plus attention que ça à son langage. Ou de sa tenue. Enfin quoi que la tenue ça dépendait surtout des jours, mais visiblement aujourd'hui elle n'avait pas eu envie de faire d'effort. Un survêtement large gris, un t-shirt blanc basique auquel elle avait fait un noeud sur le bas et qui laissait donc apparaître sa taille et son ventre, un gilet à capuche trop long, elle avait attaché ses cheveux de façon sommaire, et apparemment ça ne choquait personne. Pas son patron, en tout cas, parce qu'il l'avait déjà vu débarquer comme ça et n'avait jamais rien dit. Il faut dire qu'à côté, elle faisait pas mal de ventes. Alors à partir de là...
Juno passa machinalement son index sur ses lunettes nasales, comme si elles risquaient de tomber alors qu'elles étaient parfaitement accrochées à ses narines, et elle eut un petit sourire narquois en voyant le livreur jeter un coup d'oeil à la bonbonne avec incompréhension. "C'est pour tout faire péter si on essaie de nous voler. On a une close dans notre contrat qui stipule qu'on accepte de jouer les kamikazes en cas d'extrême nécessité." dit-elle avec un air parfaitement sérieux. Franchement, des regards comme ça elle en avait toute la journée. Parfois les gens avaient assez de courage pour lui poser la question qui leur brûlait les lèvres, et parfois ils se contentaient de la regarder de travers et/ou avec curiosité. Dans un cas comme dans l'autre, elle sortait une connerie différente à chaque fois. Aujourd'hui, elle avait expliqué le plus sérieusement possible à une cliente qu'elle était addicte à la méthamphétamine et que du coup elle gardait une réserve qu'elle sniffait à longueur de journée avec sa bonbonne. Faut vraiment ne rien savoir de la drogue pour croire un truc pareil, en tout cas la nana est repartie avec un regard aussi dédaigneux que condescendant. Lola, la collègue de Juno, était encore là à ce moment et avait explosé de rire une fois la vieille morue partie. Il était rare d'avoir de bons collègues, Juno s'estimait heureuse d'être tombée sur la jolie blonde avec qui elle pouvait parler de tout et de rien, mais surtout des clients. Mais si la plupart avait un regard critique sur cet attirail médical, le livreur n'avait pas l'air bien méchant. Alors elle laissa finalement se dessiner un sourire sur ses lèvres, rompant avec le sérieux de sa blague. "C'est conçu pour me garder en vie, pas pour commettre une extermination de masse, vous en faites pas..." lui expliqua-t-elle.
Les fleurs ne sont pas pour elle, il faut dire que Keon ne vient jamais ici pour la simple et bonne raison qu’il ne peut rien de permettre. Il n’achète que de la seconde main, via internet ou encore sur les marchés au puces plutôt nombreux à Los Angeles. Les gens vident si souvent leurs placards par ici, alors que Keon peine à remplir les siens.
- Il faut mettre un petit carré de sucre dans l’eau, avec de l’huile de vinaigre si vous avez.
Un petit conseil de vendeur qui vaut ce qu’il vaut. Remède qu'Élisabeth lui demande de transmettre à leurs clients s’ils ont peur que leur fleurs se fanent trop vite. Keon lui, n’y connait absolument rien, mais il est plutôt doué pour croire ce qu’on lui dit et transmettre bêtement. Il faut dire qu’il lui est difficile de constater par lui-même si cette histoire de sucre est véridique ou pas. Ce n’est pas l’envie qui lui manque d’offrir des fleurs à Loraye, lui qui croit si naïvement à des sentiments réciproques.
Ce petit cœur candide n’as pas fini de se faire meurtrir.
Il dresse les sourcils lorsqu’elle lui dit que c’est un explosif. Keon a pourtant déjà vu des lunettes à oxygène, il en a jamais eu lui-même, directement au masque chez Jacob alors que l’on venait de tenter de l’égorger. Une épreuve qui laisse une cicatrice indélébile sur sa gorge. Le médium ne quitte pas la brune du regard, jusqu’à ce qu’elle sourie avant de lui donner une réponse moins angoissante. Il repli le petit carton entre ses doigts pour le ranger dans sa poche de manteau. Un poche à peine trouée !
- Est-ce que tu meurs sans ça ?
Il sent souffler d’indignation une cliente dans son dos. Il ouvre davantage les yeux sous la surprise, se tordant la nuque pour regarder la jeune femme en question. Bon chic, bon genre, smartphone en main. Elle le regarde en battant de ses long faux-cils avec dédain. Keon se sent rapidement diminué par ce genre de personnes, il lui est si facile pour lui de ne pas se sentir à sa place.
Elle ne justifie pas son soupire, Keon ne comprend pas ce qu’il a pu faire de mal ou d’offensant. Keon est un personnage adorablement grossier. La cliente le détaille de bas en haut, il a l’habitude de cette attitude à son égard, ça ne le dérange pas, pas plus que de “tchip” qu’elle effectue afin de le faire déguerpir s’il a terminé.
Le brun pivote hâtivement vers la vendeuse pour lui adresser un sourire.
- J’crois que j’dois y aller !
D’ailleurs il ne se fait pas priver, il n’est pas très adroit pour faire de nouvelle rencontre, pas étonnant, maladroit comme il est. Il est cependant curieux le médium, il a bien envie de lui demander ce qu’elle a, si elle va survivre, si elle va guérir surtout. Un cancer ? Il n’en sait rien, mais une chose certaine, il aimerait bien savoir… Parce que Keon adore apprendre de nouvelles choses, il se rempli la tête comme il peut avec sa curiosité mal placée.
Peut-être une autre fois.
Keon s’écarte du comptoir pour laisser place à la jeune femme qui ne se gène pas pour étaler bon nombres d’articles qu’elle a choisis sans regarder le montant, elle agite déjà sa carte bleue comme si chaque seconde de sa vie valait un milliard de dollar.
Maudits enfants de riches… La roue de la fortune, tellement injuste.
jet de dés ! :
1-3 : Keon recule, se fait de nouveau bousculer et tombe de son parka la boite de jeu Zelda qu’il s’appretait à voler. 4 - 5 : La cliente dénonce Keon.
† The Legend of Zelda: Twilight Princess I'm wasting my young years. It doesn't matter here I'm chasing more ideas. It doesn't matter here baby I'm wasting my young years.
Juno n'y connaissait absolument rien en fleurs, d'ailleurs elle n'aimait même pas ça. Et pourtant, en voyant le joli bouquet avec la petite carte dedans, elle se disait qu'elle aussi, elle aimerait bien qu'on pense à elle comme ça. Mais vu son talent pour expulser les gens de sa vie quand elle estimait qu'ils devenaient trop proches, ce n'était pas prêt d'arriver. Elle préférait encore ne jamais rien recevoir de personne et pouvoir mourir sans crainte que de paniquer à l'idée de ne plus jamais voir tous ses amis du jour au lendemain. C'était radicale, pas forcément très joyeux, mais jusqu'à maintenant ça fonctionnait. Elle n'avait rien ni personne dans la vie, rien à perdre, donc la mort ne l'effrayait pas. CQFD. "De l'huile de vinaigre on doit pas avoir ça, mais de l'eau et du sucre ça doit pouvoir se faire." Au moins pour essayer de les faire tenir jusqu'au lendemain. Et puis la question fuse, imprévisible et pourtant violente à chaque fois que quelqu'un la pose. D'ailleurs, la cliente derrière lui semble s'impatienter, voir s'offusquer, alors que ce n'est pas du tout à elle de réagir. Elle doit être pressée, comme la majorité des clients qui se pointent ici. "Je meurs aussi avec, mais moins rapidement." répond-elle franchement. D'ordinaire, ce genre de question la gonfle et elle répond une connerie. Mais avec ce petit livreur, c'est autre chose, comme un lien invisible, comme s'ils partageaient une certaine misère, chacune différente, mais tout aussi difficile à vivre l'une que l'autre.
Soudain Juno capta le regard de la cliente sur Keon, et elle sentit son sang ne faire qu'un tour, parce que le mépris se lisait clairement dans son regard. Elle ne pouvait cependant pas décemment insulter cette connasse devant tout le monde, elle avait une certaine immunité grâce à ses ventes, mais elle n'était pas intouchable non plus. Alors elle se mordit la lèvre, prise de peine en voyant que le jeune homme ne savait plus où se foutre. Il s'écarta, maladroitement, et Juno lança un regard de travers à la cliente qui ne comprit pas cette soudaine agressivité muette. "Attends ! Je finis dans..." Le garçon heurta quelqu'un d'autre et un jeu tomba de sa parka. Pendant une fraction de seconde, Juno se sentit comme trahie, parce qu'elle le trouvait cool, et qu'il avait essayé de piquer un truc sous son nez. Elle fronça les sourcils, ne s'occupant absolument pas de la cliente qui s'impatientait. Et puis elle décida de passer au dessus de tout ça, de s'en foutre. "Je finis dans dix minutes... On pourrait aller manger un truc ?" acheva-t-elle sans se soucier de la jaquette qui traînait par terre. Pour la simple et bonne raison que le jeu n'était pas dedans. Elle prit d'ailleurs les articles que la femme avait posé sur le comptoir, se rendit dans l'arrière boutique et revint après trois minutes pour encaisser la cliente.
Ça doit être terrible de savoir que l’on va bientôt mourir, ou libérateur… Keon idéalise la mort parfois, il la voit comme la liberté ultime. Mais il a conscience que son cas est un peu à part, mais savoir que l’on va mourir bientôt, ça doit changer la vision des choses. Keon ne pensait pas qu’il aurait une vie après les vampires Mambo, mais il est libre désormais, sans la moindre idée de combien de temps ça va prendre avant qu’on lui retire ça, ni de quelle manière. Il esquisse cependant un petite sourire à la brune, il est confus avec de telles pensées. Il aimerai lui dire qu’il est désolé pour elle, mais il a juste envie de lui dire qu’elle est chanceuse et ça, mieux valait ne rien dire, pas vrai ?
Il s’éloigne, chassé par la cliente dans son dos, la vendeuse débuter une phrase, il se fait bousculer et là, Zelda prend la fuite. Keon se fige, comme un animal prit dans les phrase d’une voiture. La pause semble en dire long sur son sort, puis elle achève sa phrase de manière étonnante. Il relève les yeux vers elle tandis qu’elle disparait en arrière-boutique. Le médium se baisse pour ramasser la boite et la dépose sur le comptoir avant de filer vers la sortie, il s'enfuit littéralement paniqué. D’habitude, il n’est pas si mauvais voleur. Il n’a jamais volé un jeu, c’est tellement secondaire, pas comme lorsqu’il prend de la nourriture au supermarché ou un peu de savon sur son lieu de travail…
C’est beaucoup plus loin, happé par la rue commerçante, il s’arrête devant un stand de corn dog. Il plonge sa main dans sa poche pour en faire un rapide inventaire.
De retour devant la boutique, chargé d’un sac en papier remplit de quelques corn dog dont l’odeur tord son estomac bien trop vide. Il a dépensé plus d’argent qu’il ne l’aurait du aujourd’hui, mais il ne le dira pas à Loraye, ça règlera le problème pour ce jour.
Il vit la fille aux tubes dans le nez sortir de la boutique, il hésite brièvement avant de s’engager dans sa direction avec un léger sourire aux lèvres.
- Tu veux les manger avec moi ?
Il n’a pas l’habitude d’aborder quelqu’un de la sorte, même si c’est elle qui l’a invité en première, il n’est pas certain de la conduite à tenir. Il conserve cependant son sourire : - Désolé d’être parti… J’avais peur que tu m’dénonce ou… J’suis désolé d’avoir voulu voler c’est que… J’ai pas vraiment les moyens et j’m’ennui des fois.
Il n’est pas certain que la moindre excuses soit valable pour justifier son comportement, mais au moins il aura essayé. Il agite un peu le sachet, avec précaution, ne manquerait plus que sa maladresse légendaire fiche en l’air ses emplettes du jour !
- C’est pas des fleurs, mais c’est beaucoup plus délicieux.
Un bouquet de corn dog… Il pouffe de rire à cette pensée, bien que ça pourrait être une idée à soumettre à la boutique, au moins, il pourra peut-être finir les invendus !
† The Legend of Zelda: Twilight Princess I'm wasting my young years. It doesn't matter here I'm chasing more ideas. It doesn't matter here baby I'm wasting my young years.
Elle n'en attendait pas moins de lui, et pourtant lorsqu'elle revint dans la boutique, le garçon avait disparu. Forcément, être pris en flagrant délit de vol devait taper plus sur l'ego qu'un coup de matraque. La jeune femme sentit toutefois une grande déception, comme si toute cette histoire, qui s'avérait prometteuse, venait de lui glisser entre les doigts. Elle aurait aimé le rassurer, lui dire que ce n'était pas très grave, qu'elle s'en foutait, qu'ils en avaient rien à foutre de l'avis de la connasse de cliente qui l'avait regardé de travers. Que les gens ne comptaient pas, et que c'était tout ce qu'il devait intégrer. Le jeu avait été reposé sur le comptoir, ce qui acheva d'attrister la vendeuse. Elle mit alors un point d'honneur à se montrer aussi désagréable que possible avec la cliente qu'elle considérait responsable de toute ceci, lui arracha pratiquement son argent des mains, lui balança presque sa monnaie sur le comptoir et lui repoussa ses jaquettes de jeux vers elle sans un regard, avant de tracer à travers la foule de la boutique pour aller jusqu'à la porte de la boutique. Elle chercha alors le jeune homme du regard, mais la foule était trop dense, trop mouvante. Il avait disparu.
Elle retourna au comptoir avec déception, mais soulagée toutefois que l'autre conne se soit tirée -et ne reviendrait probablement jamais-, et elle entreprit de sortir doucement les clients qui persistaient à traîner malgré l'heure de fermeture. Une fois seule, elle ferma à clé, le temps de faire la caisse, de nettoyer, tout en jetant fréquemment des regards sur Link et son nez dessiné beaucoup trop pointu. Sans trop savoir pourquoi, elle alla chercher le jeu qu'elle rangea dans sa boîte et le paya, avant de mettre de côté tout le bordel de nettoyage. Son regard se posa alors sur les fleurs, qui trônaient encore à l'arrière, et elle lâcha un vague "fuck" avant de retourner rapidement à l'arrière pour les mettre dans de l'eau et balancer un petit morceau de sucre à café dedans. En espérant qu'elles soient pas fanées demain...
Elle sortit de la boutique et chercha ses clés pendant quelques secondes pour fermer la porte à double-tour. La foule se dissipait peu à peu, les boutiques avaient toutes plus ou moins fermé et la rue n'avait plus grand intérêt. - Tu veux les manger avec moi ? Juno tourna la tête avec surprise, ne s'attendant pas à réentendre le son de cette voix de si tôt. Un sourire s'installa sur ses lèvres et elle hocha simplement la tête. Elle n'avait pas envie de lui demander des comptes, elle estimait qu'il avait déjà eu un courage de dingue de revenir. Elle rangea les clés dans son sac et reposa la main sur la petite chariote qui traînait sa bonbonne de gaz, comme une petite vieille qui s'appuierait sur sa canne. Vieux réflexe pourri. - Désolé d’être parti… J’avais peur que tu m’dénonce ou… J’suis désolé d’avoir voulu voler c’est que… J’ai pas vraiment les moyens et j’m’ennui des fois. Juno approcha un peu, pour limiter la distance entre eux. Fait assez rare pour le justifier, elle avait un air profondément bienveillant sur le visage. Pas même l'ombre d'une toute petite pointe de mesquinerie. Juste de la bienveillance. "T'excuses pas. Tu me dois rien, et le capitalisme c'est de la merde de toute façon." justifia-t-elle. Et puis de toute façon sa boîte n'était clairement pas une petite entreprise qui s'acharnait à rester debout, la franchise était connue au Japon et s'étalait petit à petit aux Etats-Unis, signe d'une florissante évolution.
- C’est pas des fleurs, mais c’est beaucoup plus délicieux."J'aime pas les fleurs." dit-elle en plongeant la main dans le sac. Elle attrapa un bâton et en sortit un corndog, qui souffla une odeur de friture faisant gargouiller son ventre. Elle passa rapidement sa langue sur ses lèvres, avec une gourmandise impatiente, et chercha du regard un endroit où ils pourraient s'asseoir pour prendre leur repas. Elle fit un signe de tête vers un banc qui n'était pas loin et l'invita à la suivre, pour qu'ils s'y installent. Parce que mine de rien, sa bonbonne de gaz était pénible à tirer. - J’m’appelle Keon. "Et moi, Juno. Alors..." commença-t-elle avec l'air tout à fait sérieux. "... C'est la peur que je fasse exploser tout le quartier pour me venger, qui t'a fait revenir ?" Bon d'accord, la bienveillance n'avait pas duré bien longtemps. Le sarcasme et la taquinerie faisaient parti intégrante de Juno, c'était plus fort qu'elle. Mais elle n'avait clairement rien de méchant. Elle mordit un bon coup dans sa saucisse, qui prit bientôt presque toute la place dans sa bouche pendant qu'elle mâchait, la faisant vaguement ressembler à un hamster. Elle avala son morceau et retira la graisse de sa bouche en y passant de nouveau sa langue, comme une gosse. "Moi aussi j'ai un truc pour toi. Parce que j'ai adoré la tête d'effroi que t'as fait tirer à l'autre connasse quand tu m'as posé des questions." Elle retira son sac de son dos et l'ouvrit pour en sortir le fameux jeu, mais elle ne le lui donna pas tout de suite. "Je te le donne seulement si j'ai le droit de venir jouer de temps en temps. Et là c'est le moment où j'espère que tu vas dire oui parce que j'ai pas la gamecube et qu'il me donne très envie." ricana-t-elle nerveusement en lui tendant le jeu. De son autre main, sur laquelle commençait à couler du ketchup, elle mordit de nouveau dans son corndog. Elle se permettait rarement de manger un truc issu de graisse animal, ce n'était pas bon pour ce qu'elle avait, alors le peu de fois où elle s'autorisait un écart, elle en profitait.
Keon ne pensait pas vraiment la surprendre avec son retour sur ses pas, mais il réalise bien qu’il ne doit pas agir “normalement” dans ce cas de figure, alors il s’empresse de justifier sa fuite un peu plus tôt en ajoutant des excuses sincères. La réponse de la brune lui fit dresser les sourcils d’étonnement, pour tout dire Keon ignore ce qu’est le capitalisme. On ne passe pas onze ans de sa vie enfermé dans une baraque sans la moindre distraction provenant de l’extérieur sans séquelles. Il n’y connait rien à la politique, à l’économie, c’est à peine s’il sait comment ça fonctionne la gestions des loyers et factures. Le médium est très limité, il apprend, mais à plus de trente ans, c’est compliqué de rattraper des notions que l’on apprend en principe bien assez tôt. Il a beau être motivé, son cerveau esquinté par l’alcool arrive bien vite à saturation. Cependant il ne perd pas espoir de s’améliorer.
Elle n’aime pas les fleurs, il ne saurait que répondre à cela. Les fleurs sont jolies, c’est étrange de ne pas aimer ça.
Il sourit lorsqu’elle pioche un corndog dans le sachet, puis il la suivit docile jusqu’au banc, non pas sans lorgner sur la bonbonne qu’elle traine avec elle. Ils firent de rapide présentation et la question de la vendeuse le fit pouffer de rire, il cache son rire derrière sa main libre. - Non, j’aime… J’aime bien la compagnie.
Des vivants, qu’il n’ajoute pas.
Pourtant, si cette femme est mourante, il pourrait être amené à la revoir. Ce serait étrange, mais il se promis que quoiqu’elle ait besoin, il l’aidera du mieux possible.
Le jeune homme peine à détacher son regard de Juno alors qu’elle mange cette saucisse de manière complètement indécente, un sandwich aurait donné moins de possibilité à ce genre de situation. Il finit par dévier le regard pour penser à autre chose et envisager manger également un morceau. Mais il n’eut pas le temps d’attraper un corndog qu’elle lui fit savoir avoir quelque chose pour lui, justifiant ce “truc” par la tête de la cliente.
- C’est vrai que les gens font souvent ce genre de tête quand je parle… Je pose beaucoup de questions qui ont l’air d’étonner les autres.
Qu’il répond avec douceur. - J’crois que c’est parce que j’suis pas très malin.
Ajoute-t-il avec un haussement d’épaule, acceptant d’être un “idiot” sans grande éducation, parce que c’est la vérité après tout. Ce serait encore plus crétin de prétendre le contraire.
Ses sourcils se lèvent lorsque ses iris se posent sur la boite du jeu qu’il avait tenté de dérober un peu plus tôt ! La condition le laisse hébété. Il tendit la main pour s'emparer de ce cadeau en répondant avec un contrôle relatif de sa joie. - Oh merci ! Oui… Oui tu peux venir chez moi… Si tu ne te moque pas de moi en me demandant ça, je… Je sais que c’est une vieille console.
Oui peut-être qu’elle se rit de lui, il ne se vexera pas, même s’il sera inévitablement un peu déçu, ce n’est pas souvent qu’il peut se faire des amis et cette perspective lui apporte toujours beaucoup d’émotion positive. Il amorce un geste qu’il stoppe, parce qu’elle est en train de manger, parce qu’ils ont les mains pleines, parce qu’elle a l’air trop fragile pour qu’il la prenne dans ses bras… Il ne voudrait pas lui faire du mal.
- Merci… Tiens, c’est tout pour toi.
Il pose le sac de corndog sur les genoux de la brune, sachant pertinemment que ce n’est pas assez comme échange, mais il n’est pas certain de pouvoir lui donner plus. Il peine encore avec le concept de cadeau, surtout d’une main étrangère, alors il peut bien sauter un repas supplémentaire ce n’est certainement pas ça qui va le tuer. Il se perd dans l’admiration de son nouveau jeu en tapotant inconsciemment des talons sur le sol, surexcité comme un gamin un matin de Noël. Noël, encore une chose qu’il lui faudra bien découvrir un jour.
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