Nora était en repérage dans une bijouterie de luxe. Habillée d’un chemisier blanc ouvert, d’un pantalon flute et d’escarpin elle dépassait toutes les vendeuses frôlant presque le mètre 85 avec ses talons. Les vendeuses gazouillaient sur son passage, elle se faisait passer pour une italienne, une femme d’un riche homme d'affaire italien. Dans quel domaine ? Qu’importe elles s’en fichaient, elle était grande, filiforme, incroyablement belle, portait des vêtements coûteux, était gracieuse et adorable. Nora alias Claudia Ceretti vérifia son reflet dans un miroir tout en analysant discrètement le dispositif de sécurité de la boutique. On lui fit essayer une parure en diamant et émeraude, le vert était une couleur qui lui allait vraiment bien. Elle demanda à boire, très bien on allait lui apporter du champagne en attendant on allait lui chercher les boucles d’oreille allant avec le collier. Une vendeuse resta avec elle, on ne pouvait pas la laisser avec une telle fortune autour du cou, de toute façon ce n’était pas grave elle n’allait rien voler aujourd’hui, elle allait même acheter une babiole. Après avoir essayé des dizaines de bijoux, assez pour faire le tour du lieu, elle achèterait un bijou peu importe lequel et repasserait voler le restant quelques semaines plus tard. Tandis qu’elle attendait pour son champagne elle remarqua une très belle jeune femme, une européenne probablement elle n’avait pas la vulgarité des américaine. Habillée avec soin elle aussi essayait des bijoux, la jeune femme avait la beauté du diable et ses yeux de Bambi aurait fait fondre n’importe qui. Nora la détailla un peu plus du regard, un peu jeune pour elle, mais exquise vraiment, quel joli teint de porcelaine et si frais. Elle était envieuse, vraiment. La créature parlait beaucoup, les vendeuses avaient l’air conquises, mais pourtant quelque chose sonnait faux elle le sentait, son instinct la titillait, Nora avait envie de creuser. Elle demanda à sa vendeuse.

- Qui est cette jeune femme ? fit-elle en désignant sa proie du menton.

Faire les poches n’était réellement pas son fort. La pauvre Ekaterina avait décidé de jeter l’éponge sur sa lamentable carrière de pickpocket et de se remettre à ce qu’elle était réellement douée; le vol de bijoux et de vêtements. Elle avait cette technique où elle posait énormément de questions dans son anglais lamentable, elle essayait plusieurs bijoux de gammes différentes et finissait par malencontreusement « oublier » d’en retirer un. Jamais le plus cher. Elle se ferait prendre tout de suite. Un qui avait un peu moins d’importance. La slave ne s’attaquait pas à n’importe quelle boutique non plus. Elle faisait attention d’en prendre une bien huppée où il y avait beaucoup de touristes, où on oublierait probablement son visage rapidement. Ces boutiques avaient généralement des assurances qui couvraient largement la majorité des vols et les employés y étaient relativement bien payés. Tout le monde était bien payé de toute manière aux yeux de la jeune ukrainienne.

Elle entra donc dans une boutique où elle n’avait jamais mis les pieds, usant de tout son charme et souriant à chaque remarque qu’elle ne comprenait à moitié pas. Généralement la barrière linguistique jouait en sa faveur. Les vendeurs étaient souvent trop gênés de lui répéter plus de trois fois qu’elle devait laisser un bijou avant d’en essayer un autre. Elle retira un collier qu’elle portait déjà. Rapidement, à l’œil nu, il avait l’air d’avoir beaucoup plus de valeur que ce qu’elle n’était en train d’essayer mais ce n’était en réalité que du toc. On n’allait pas acheter des bijoux sans d’abords en porter au moins quelques-uns. Elle continua son petit manège, répétant qu’elle était une touriste russe. Les touristes russes étaient généralement bien riches et bien dépensiers aussi. Son choix s’arrêta sur une fine chaine en or qui se dissimula parfaitement sous son collier volumineux qu’elle repassa autour de son cou alors qu’une femme essayait des émeraudes tout à fait hors de prix derrière elle.

C’était parfait, l’attention était ailleurs, elle avait le temps qu’il lui fallait pour remercier le vendeur à l’œil fuyant vers la femme qui réclamait maintenant les boucles d’oreilles pour pouvoir filer en remerciant profusément en russe et en disant qu’elle irait chercher son mari pour qu’il vienne lui acheter ce qu’elle voulait, une paire de boucles d’oreilles à diamants. On la remercia même alors qu’elle traversait gracieusement la porte, perchée sur ses escarpins. Elle ne pût s’empêcher d’hésiter cependant au coin de la rue en pensant à cette femme probablement blindée d’argent qui ne demandait qu’à se faire fouiller les poches par ses petites mains maladroites. Ekaterina fit comme à son habitude et changea de manteau, ayant toujours un double dans son sac. Elle remonta ses cheveux en un chignon et glissa le collier dans sa poche… vide?

La slave se retourna en panique et reconnu la femme qui marchait dans la direction opposée. Elle couru pour la rattraper, paniquée. Elle n’avait pas grand-chose et elle tenait à ce qu’elle possédait. Katya avait déjà beaucoup de mal à dissimuler son salaire hebdomadaire de ses compagnons de dortoir, si en plus elle devait commencer à se faire voler dans la rue par des gens plus friqués qu’elle…

« Donne! »

Dit-elle de son accent slave sur un ton autoritaire à la femme qui devait bien faire une tête de plus qu’elle.

Une russe lui répondit-elle, une petite anonyme donc, son mari semblait riche ajouta la vendeuse. Nora arqua un sourcil surprise, puis soupçonneuse. Elle semblait bien jeune pour être déjà mariée, les riches oligarques aimaient s’amuser, ceux qui ne faisait pas des mariages d’affaires épousait de belles jeunes femmes à leur cinquantaine, mais ils ne se marrait pas sur un coup de tête non plus, il fréquentait de longues années une fraîche jouvencelle (avec des maîtresses s’il voulait vraiment profiter jusqu’à la fin) avant de lui mettre la bague au doigts. Or elle semblait à peine avoir 20 ans. Une riche russe aurait parlé anglais mieux qu’elle, elle était donc une arriviste tentant de se faire une place. Il y avait quelque chose de suspect. Les boucles demandés arrivèrent et elle prétexta une soudaine urgence, elle promit de repasser plus tard, mais pris tout de même une paire de boucle en diamant et saphir rose qu’elle paya. Les vendeuses furent surprises de son choix et elles n’avaient pas tord le rose ne lui allait pas au teint. Nora rangea précipitamment ses affaires, elle enfila sa veste et sortit, elle frôla la jeune fille pour la tester allait-elle lui faire les poches ? Non, rien, bon elle s’était peut-être trompée au final, ça arrivait. Quel ne fut donc pas sa surprise donc quand elle l’a vu surgir devant elle l’air vaguement furieuse. La suite la fit presque rire et elle mit sa main devant sa bouche pour s’en empêcher. Une fois certaine de se contrôler elle retira sa veste, elle n’avait pas de poche à son pantalon et sa chemise était trop fine et trop ouverte pour cacher quoique ce soit. Elle la balança à la jeune fille.

- Je ne vous ai rien pris, vous pouvez vérifier, vous avez regardé dans vos deux poches, déclara-t-elle amusée avant de sortir de sa manche le fin collier que la petite pie avait volé. Oh si j’ai peut-être pris cela à l’instant, fit-elle en le dévoilant dans le creux de sa main.

Distraction puis action. La distraction avait été le manteau qu’elle lui avait balancé, monopolisant ses réflexes donc son regard et ses deux mains. La jeune femme encombrée avait dû faire des choix. Ses mains légères (les siennes) avait fait le reste. Elle aurait pu ne rien trouver, elle n’avait fouillé que les poches, pas eu le temps pour plus. Mais Bambi était jeune et avait caché son butin dans les poches, le premier endroit qu’on aurait fouillé, c’était assez maladroit. Elle poursuivit en russe, elle voyageait énormément et tout le temps, elle parlait bien des langues.

- Alors Bambi tu es avec qui ? Yuki ? Peut-être Svetlana ?

Généralement les petites voleuses tapant dans le luxe travaillait avec une organisation d’escroc qui les faisait changer de ville assez régulièrement pour pas griller leur couverture.

La jolie poupée ne parlait pas russe, pas couramment du moins, elle n’était donc probablement pas russe, néanmoins elle avait cet accent qui venait tout droit des pays de l’Europe de l’est. Nora avait beau parler bien des langues à causes de ses « voyages », elle ne pouvait pas être une experte en toutes et n’arrivait donc pas à en savoir plus sur la jeune fille. La jeune fille était vraiment exquise, Nora était fascinée par ses traits, dommage qu’elle ne soit probablement qu’une humaine. Nora détestait les humains, mais les temps avaient évolué et il était devenu rare qu’elle en tue et certainement pas sans raison. Le visage de Bambi exprima un certain dégoût quand elle lui parla d’allié potentiel, très vite elle démentit et la dragonne songea que cette gamine pouvait peut-être lui être utile, même si elle ne savait pas en quoi pour le moment.

- Vraiment personne ? provoqua la dragonne avec un sourire un brin moqueur juste pour embêter l’humaine. Impressionnant.

Nora était un dragon, elle était donc un prédateur et qu’elle ait pris forme humaine ne changeait rien à cela. Son regard examina silencieusement la jeune femme sous toute les coutures. Nora aimait sa robe, féminine, légère, aérienne et moderne. Elle avait bon goût, souvent les petites voleuses se contentaient de suivre les tendances ce qui les rendait un peu plate, mais là il y avait une prise de risque. Nora avait envie de s’amuser un peu, de voir ce que la slave avait dans le ventre.

- Je suis une voleuse, concéda-t-elle avec un sourire charmeur qui avait pour but de rassurer sa proie, comme toi. Tu voudrais boire quelque chose avec moi ? Il y’a un salon de thé, là, elle désigna du doigts une petite devanture bleue. Tu me rends mon manteau ?

Bambi ne s’en rendait sans doute pas compte, mais elle avait gardé le manteau qu’elle lui avait balancé dans les bras deux minutes plus tôt.

- Je pourrais te dire ce qui n’allais pas.

Nora était en train d'alterner le chaud et le froid de façon bien consciente dans l'optique de déstabiliser la jeune femme afin que la manipulation soit plus facile si besoin.

Le nez bien retroussé, Ekaterina se tourna vers la devanture bleue pointée par la voleuse qui l’avais prise la main dans le sac. Vraiment, elle se demandait si elle était dans la bonne lignée question occupation. Elle était peut-être meilleure pour s’occuper des animaux que de voler au final. Faire les poches était hors de questions vu le nombre de fois qu’elle s’était fait pincer. Maintenant, elle en était à sa deuxième altercation après un petit vol à l’étalage bien innocent. Elle n’avait peut-être pas autant de talent qu’elle se plaisait à le croire.

Le jeune femme, hésitante, regarda le manteau dans ses mains, puis la devanture de nouveau. Elle tendit le vêtement vers la belle brune qui lui suggéra de lui dire ce qui n’allait pas avec sa manière de faire. Qu’est-ce qu’elle pouvait bien en connaître? Elle avait l’air d’avoir amplement d’argent pour s’acheter tout ce qu’elle voulait de toute manière, qu’est-ce qu’elle pouvait bien tirer de ce métier plein de risques et bien peu lucratif? Enfin, peu lucratif lorsqu’on le pratiquait comme elle ne le faisait, c’est-à-dire, pas très bien. Malgré ses doutes, la slave ne refusait jamais une invitation à ce qui pouvait devenir un petit casse-croute. Elle mangeait, mais ses rations restaient toujours bien maigre au refuge puisqu’elle attendait toujours la fin des repas, lorsque tout le monde avait déjà quitté.

« Okay. »

Dit-elle en se retournant, attendant le moment opportun pour traverser la rue sans se faire frapper par une personne trop pressée de Los Angeles, comme il y en avait des milliers. Si la brune tentait de la manipuler, Ekaterina ne s’en rendait absolument pas compte. Trop peu expérimentée dans les interactions sociales. Elle ne comprenait cependant pas pourquoi ceux qui la prenaient à son petit jeu finissaient toujours par lui offrir quelque chose. Est-ce qu’elle faisait si pitié qu’ils ne pouvaient résister à venir à la rescousse de cette pauvre immigrante involontaire?

« Mais, la question. Il faut répondre. »

Parce qu’elle ne savait toujours pas qui était cette femme mystérieuse qui semblait avoir des goûts de luxe semblables aux siens. Katya cherchait à avoir au moins un nom, même demandé maladroitement dans sa langue seconde maladroite. Elle prit une grande respiration avant de commencer à traverser la rue. La jeune slave était une boule de nerfs, son anxiété était toujours au maximum et le simple fait de traverser une rue aussi passante lui demandait déjà énormément d’efforts mais elle désirait garder la face devant cette inconnue, devant tout le monde en fait.

La jolie brune lui tendit son manteau pour lui rendre, Nora l’attrapa et l’enfila rapidement sur ses épaules. La jeune femme accepta ensuite de la suivre dans le salon de thé qu’elle lui avait désigné, elle l’avait choisi parfaitement au hasard, elle ne connaissait pas les lieux, mais l’endroit semblait accueillant et puis de toute façon pour dire vrai Nora n’était pas si difficile. La dragonne était autant habituée au restaurant étoilée, qu’au bar miteux sur les grandes routes.  La brune était capable de se fondre dans n’importe quel environnement, elle avait connu la mendicité aussi bien que la richesse. Quand son frère voulait qu’ils soient des gens honnêtes, ils étaient presque morts de faim durant une famine. C’était à cause de cela qu’elle était devenue une voleuse sans vergogne.

- Claudia Ceretti, tu peux m’appeler Claudia. Ça ne pose pas de problème…

Nora ne disait pas son vrai prénom à n’importe qui, elle passait sa vie à jongler avec de multiples identités. Dernièrement elle se faisait nommer Claudia Ceretti, avec sa peau au tonalité olive il était aisé de se faire passer pour une méditerranéenne. Elle était née dragon, elle n’avait pas vraiment de patrie et quand on l’avait transformé en humaine elle avait décidé à quoi elle ressemblerait. La dragonne avait fait en sorte de ressembler à son frère et à ses sœurs, mais en réalité elle n’avait pas été forcé de le faire. Elle aurait pu être une petite blonde si elle l’avait désiré. Elle se dirigea vers le salon de thé choisi et entra. Une dame d’une cinquantaine d’année vint les accueillir et les installa près d’une fenêtre. C’étaient toujours les premières chaises remplies pour attirer d’autres clients. On lui offrir une carte et elle la feuilleta, bien sûre il n’y avait pas d’alcool à part dans le irish cofee.

- Un irish coffee et une gaufre pomme caramel, commanda-t-elle sans hésiter. Tu sais ce que tu veux ou tu as besoin d’un peu de temps pour y réfléchir ? demanda-t-elle à Bambi.

Nora n’était même pas certaine qu’elle sache lire l’anglais, sa maîtrise de la langue semblait en effet plus qu’aléatoire. Et même si elle savait le lire, peut-être ne le comprenait-elle pas.

- Je vais prendre aussi une part de carrot cake, ajouta-t-elle finalement par gourmandise. Mon amie hésite encore vous pouvez repasser dans 5 minutes ?

La vendeuse répondit que oui, elle s’en alla et Nora se tourna vers la jolie brune.

- Tu veux que je commande pour toi ? Tu comprends mieux le russe ou l’anglais ? Elle répéta ses questions en russe.

La jeune ukrainienne soupira le nom de son interlocutrice sous son souffle pour s’en rappeler. Elle faisait ça à chaque nouveau mot et pour elle, il y en avait des milliers. Elle ne se risqua même pas à essayer de prononcer son nom de famille qu’elle avait déjà partiellement oublié. Elle prit place à l’endroit qu’on lui indiquait. Même si elle voulait être sa propre personne, Ekaterina avait le réflex de faire ce qu’on lui disait de faire sans protester, sans le réaliser non plus. On plaça un menu devant elle et alors que Claudia semblait être venue ici régulièrement par la manière dont elle se mouvait dans l’espace mais aussi comment elle avait fait un choix rapide, Ekaterina regardait le menu, les sourcils froncés. La voleuse sembla remarquer sa confusion. Elle commanda un gâteau au carottes supplémentaire et demanda à la serveuse de revenir dans quelques minutes.

« Je sais lire. »

Dit-elle, déjà en train de se renfrogner. C’était, en réalité, à moitié vrai. Elle n’était déjà pas très habile pour la lecture en cyrillique, elle avait encore plus de difficulté avec l’anglais. Son éducation s’était arrêtée très tôt et si ce n’était des putes qui avaient pitié d’elle et qui visitaient périodiquement les fêtes données par son « propriétaire », elle n’aurait probablement pas pu apprendre l’alphabet. Elle planchait dur cependant, chaque semaine, un nouveau rendez-vous avec son blondinet de professeur qui avait une patience démesurée.

« Je commande. Je parle pas russe. Juste Ukraine. »

Dit-elle en se callant un peu dans son siège. Elle était susceptible, la petite ukrainienne. Elle se mordit la lèvre inférieur et leva les yeux vers son interlocutrice.

« Et anglais. »

Ajouta-t-elle, décidé à faire croire à tout le monde que son anglais était beaucoup plus intelligible qu’il ne l’était réellement. La serveuse revint vers la table des deux brunes. Ekaterina n’avait même pas réussi à passer au travers le quart du menu et en avait peut-être compris seulement le dixième mais elle était décidée à donner sa commande elle-même. De toute manière, après autant d’attitude, ce serait bien stupide de s’avouer vaincu par un simple bout de papier, non? Elle posa le menu sur la table, tournant un visage fermé et assuré à la serveuse.

« Thé. Noir. Et ça. »

Elle pointa un sandwich tout à fait au hasard. Ils ne pouvaient certainement pas lui apporter quelque chose de si terrible que ça. De toute, tout était meilleur que la nourriture qui l’avait gardé en vie jusqu’ici. La serveuse lui fit un sourire forcé. Ekaterina n’avait pas été particulièrement douce avec celle-ci mais elle ne s’en rendait pas compte. La barrière linguistique, le stress, la situation étrange, son manque de socialisation, elle ne pourrait pas réellement savoir comment elle devrait se comporter dans un restaurant du genre.

Pour dire vrai, Nora était fascinée par la beauté de son interlocutrice. Ses grands yeux, ses longs cils, sa peau pâle, les proportions presque exotiques de ses traits, son corps mince, mais pas rachitique, tout en Ekat l’appelait. Elle semblait unique, mais en même temps classique. Ce genre de beauté n’appelait pas forcément tous le monde, mais elle transcendait les critères éphémères des modes. La dragonne la trouvait extrêmement attractive et elle avait envie de la posséder, pour autant elle ne s’adressait pas à elle dans une optique de séduction. Son instinct était en train de la tromper, mais elle ne pensait pas la jeune fille potentiellement attiré par les femmes. C’était plutôt rare qu’elle se fourvoie, mais c’était pourtant en train d’arriver, personne n’est parfait. La rébellion de son interlocutrice l’amusa, elle était vexée, elle avait de la fierté, c’était attendrissant. Nora ne s’en offusqua pas, elle avait encore plus envie de l’embêter, comme un chat avec sa proie, un sourire glissa sur ses lèvres amusées. Le regard brûlant qu’elle lui lança affirmant qu’elle parlait anglais était délicieux.  La serveuse revint prendre sa commande et la jeune femme dans un anglais approximatif donna ses ordres. La barrière de la langue lui donna un air rude et la serveuse sembla mal le prendre, malgré son sourire de façade. Nora pourtant comprenait la jeune femme, lorsqu’on lui avait donné une enveloppe humaine, elle n’avait jamais parlé, dans aucune langue, sa vie n’avait été qu’émotion, certainement pas langage, c’était une notion incongrue pour elle et s’y plier avait été très difficile. Probablement que bien des fois elle ne s’était pas faite bien comprendre à ses débuts.

- L’Ukraine donc, cela fait un moment que je n’y ai pas mis les pieds je dois avouer.

Pas grand-chose à voler là-bas, le pays était assez pauvre. Nora avait voyagé partout dans le monde, elle avait été absolument partout, elle était une aventurière friande de nouveauté, mais bien sûre elle avait fini par développer des préférences. La serveuse lui avait déposé son café, le restant était encore en préparation, Nora en but une gorgée, puis elle attaqua la conversation.

- Tu devrais dire que tu as un petit ami, pas un mari, tu es bien trop jeune pour être marié. En plus si tu étais marié, il t'aurait donné une carte de crédit. En fait comment dois-je t’appeler ?