Être avec elle était incroyable – impensable même – autant que pouvait l'être la perspective d'un regard nouveau sur sa personne. Pourtant, les choses évoluaient en ce sens et bientôt « Karlito » n'aura plus aucune raison d'être, si ce n'est pour rappeler à Fitz, cette solitude qu'il avait perdue et les heures difficiles inhérentes à ce statut. Tout ça grâce à Lyanna qui – il le savait – ne trichait plus et livrait, elle aussi une part d'elle, invisible aux communs des mortels, mais pas pour Karl. Et c'est confiant, bien que légèrement anxieux, que ce dernier – arborant fièrement la tenue que sa petite amie avait choisi pour lui – regagna sa chambre avant qu'ensemble, ils quittent la demeure des Fitzgerald. Passé les murs sécurisants de son domicile et ce même s'il s'évertuait encore à faire bonne figure, le jeune Karl n'en demeurait pas moins un peu stressé de se rendre à cette fête. Pour lui, c'était une grande première, si l'on omet les fêtes auxquelles il s'était rendu avec ses amis mortels lorsqu'il était encore scolarisé parmi-eux.
Le trajet parut étrangement rapide et lorsque les deux jeunes sorciers arrivèrent sur les lieux d'un crime par encore perpétrer, Karl sentit son penchant maladroit refaire surface. Il y avait déjà du monde, trop à son goût et cela avait tendance à lui rappeler quelques mauvais souvenirs dont il se serait bien passé. Mais avant de s'en rendre compte et à sa plus grande joie, Lyanna prit les devants en l'embrassant au nez et à la barbe de toutes et tous. Un baiser qui venait de ragaillardir le jeune sorcier à ses côtés qui se sentait dès lors plus fort désormais pour tous les affronter. Elizabeth, l'une des colocataires de miss Johnston, fut la première à accoster le nouveau couple, cachant probablement son étonnement pour ne pas froisser son amie qui ne tarda pas plus longtemps pour lui présenter Karl en bonne et due forme avant de mettre les voiles. Pourvu de son gobelet chargé en punch, Karlito, qui n'était plus, s'arma d'un peu de courage pour au moins faire un compliment à Lyanna – un compliment qu'il trouva totalement ridicule après coup. « - Cool que tu acceptes le compliment, j'ai moins l'impression d'être ridicule comme ça » Il répondit à son doux sourire avant de consentir, non sans hésitation à suivre la jeune sorcière sur la piste de danse improvisée. « - Tu sais tu peux tout accepter de moi, sauf ma façon de danser, du moins si tu tiens encore à tes pieds » Il se détendait peu à peu, se permettant ainsi de faire montre d'ironie et d'oublier les regards posés sur eux, mais plus encore sur Lyanna.
Les premiers pas furent laborieux pour Fritz, qui n'avait pas le rythme dans la peau. Plus les éclats de rire fusèrent avant que les corps cessent de se trémousser pour un peu plus de lenteur autour d'un slow. Karl sembla s'amuser autant que Lyanna et ne regrettait finalement pas sa venue, à tel point que lorsque le temps de partir fut venu, le sorcier fut surpris. « - Wow, on est donc là depuis plus de trois heures ? » Il observa la plupart des jeunes qui s'en allaient avant de reporter toute son attention sur la jeune femme qui lui faisait face. « - Allez ! On embarque alors. » Il attrapa donc sa main pour qu'à son tour, ils quittent les lieux à pied, puisqu'au vue de l'heure, il ne fallait pas compter sur les bus qui n'avaient de « nuit » que l'appellation. Les deux amoureux devaient donc marcher pour ainsi regagner le domicile des Johnston.
Karl, le sourire aux lèvres, s'apprêtait à s'enquérir du nombre de kilomètres, mais fut bien malgré lui coupé dans son élan par les interrogations de Lily qui se demandait, à juste titre, s'ils ne craignaient rien. « - Même avec la pleine lune, on ne risque rien. Maze veille sur nous. » Et il est vrai que le magnifique loup argenté, n'était pas loin, Karl pouvait le sentir au vu de ce lien si spécial qui unit un sorcier à son familier. Fitz resserra l'étreinte de sa main autour de celle de Lyanna avant qu'ils reprennent la marche sous la lueur des réverbères sur leur passage après qu'ils eurent quittés la forêt où s'était tenu les récentes festivités. Tout semblait si calme aux vues de l'heure tardive et c'était agréable de voir la ville endormie, délestée de la forte influence des heures de pointes en journée. « - Tu ne trouves pas ça agréable ? Ce calme, cette atmosphère légère ? Moi ça me fascine de voir la ville endormie. Et c'est aussi une excuse, parce que je ne crois pas connaître de sorts de téléportations. Ce n'est pas grave, on a tout notre temps. Je voulais quand même te remercier. Maintenant, j'ai enfin l'impression d'être sorti des ténèbres. Je sais la métaphore est peut-être un peu tirée par les cheveux, mais je n'ai pas trouvé mieux pour illustrer mon ressenti. Tu es certainement ce qui m'est arrivé de mieux Lyanna Johnston. J'espère que tu t'en rends compte. » Il lui offrit à nouveau le plus beau des sourires avant de l'arrêter pour lui donner ce baiser tant attendu. Un baiser qui avec elle, gagnait en intensité – sans que Fitz ne s’ébranle face à tant de passion malgré leur jeune âge – lui qui n'étant pourtant pas un adepte des grandes effusions. « - On est encore loin ? » laissa-t-il entendre en se détachant à regret pour mieux reprendre son souffle. Son regard brillait étreint par la passion. « - Je n'ai jamais autant désiré une fille qu'à cet instant. Comment fais-tu ? »
- T’es pas ridicule, Karl ! avait-elle soufflé à son petit ami, ne quittant plus son regard des yeux.
Elle était si heureuse d’être avec lui, et l’être à cette soirée qui serait, à n’en pas douter, le premier pas de Karl Fitzgerald dans la popularité qu’il n’avait pas encore connue et que pourtant il méritait. Lily avait été persuadée dès la rentrée des classes que ce jeune homme n’était pas apprécié à sa juste valeur et comme elle, elle l’appréciait, elle voulait que tous en fassent de même. Elle se sentait si bien avec lui, pourtant cela ne faisait que quelques heures qu’ils s’étaient rapprochés, mais elle avait l’intuition que c’était une bonne chose.
Ce que le temps passe vite quand on s’amuse ! Les deux jeunes tourtereaux s’en étaient aperçus et quittèrent la soirée à sa toute fin, prenant une bonne marche pour se rapprocher du domicile des Johnston déserté par ces derniers. Lily demanda de manière faussement ingénue s’ils ne risquaient rien. Elle savait que c’était le cas, sans quoi elle n’aurait pas pris le risque de rentrer à pied avec Karl. Ce dernier assura que Maze était dans le coin, rappelant à l’adolescente que le familier de son petit ami était un loup.
- Je l’avais oublié, le pauvre. C’est tellement cool que vous puissiez vous parler comme ça. Qu’est-ce qu’il dit ?
Ils avançaient tranquillement dans le quartier résidentiel à présent, éclairés par les réverbères. Lyanna sourit, amusée. - Je sais que tu connais pas de sort de téléportation, je crois qu’on n’en voit qu’en dernière année. Mais c’est vrai que c’est agréable la nuit. J’aime beaucoup mettre le nez dehors à la nuit tombée.
C’est alors que Fitz dit des mots qui touchèrent la jeune sorcière. Elle qui avait fait de son mieux pour qu’il passe une bonne soirée et sociabilise un peu, elle se rendit compte que pour son chéri, c’était bien plus encore.
- Oh Karl, murmura-t-elle. Je suis tellement touchée et même flattée par tout ce que tu dis.
Elle se mit face à lui et posa sa main sur sa joue avant qu’un baiser ne soit échangé. Ce baiser la réchauffa des pieds à la tête, c’était comme magique, bien que ce ne soit rien de tel. C’était simplement de la passion. Il finit par se détacher pour demander s’ils étaient encore loin. Elle lui sourit.
- La maison est juste là.
En effet, ils s’étaient arrêtés devant le portail en fer forgé qui laissait apparaître un court chemin jusqu’à la porte d’entrée en bois sculpté de la maison. Lily sortit la clé de son sac et reposa son regard pétillant dans celui de Fitz.
- Comment je fais ? Eh bien j’ai mis un philtre dans ton verre, bien sûr.
Gardant sa main libre dans la sienne, elle l’entraîna avec lui vers la porte d’entrée qu’elle déverrouilla pour le laisser pénétrer la maison, protégée au gros sel des créatures indésirables.
- Entre je t’en prie.
Elle referma derrière eux et verrouilla la porte.
- C’était une blague, au fait. J’ai jamais mis de philtre dans ton verre, j’ose espérer ne pas en avoir besoin, dit-elle en se rapprochant de lui d’un pas félin.
L’adolescente retira sa veste qu’elle lança sur le canapé.
- Tu veux visiter ? Ici, c’est le salon.
Elle le fit asseoir et vint tout contre lui pour l’embrasser à nouveau avec fougue, avant de détacher ses lèvres.
- Ma mère a mis un sort pour que la poussière ne vienne pas en leur absence, c'est cool hein ?
Puis, elle se rua à nouveau sur ses lèvres, enivrée par son parfum et leur promiscuité, et sans doute aussi par quelques verres de punch.
Il en arrivait encore à se demander pourquoi lui ? Pourquoi cette jeune demoiselle, belle comme le jour et au comble de la popularité, avait-elle posé son regard sur lui, isolé de tous et sans intérêt pour la plupart de ses camarades ? Qu'avait-il donc de si spécial pour qu'elle porte sur lui un tel regard, pour qu'elle lui accorde autant d'importance ? – qu'elle lui en accorde tout court. Le méritait-il vraiment ? Il se le demandait encore, visiblement pas encore assez confiant pour faire taire ces odieuses petites voix qui se jouaient de ses incertitudes. Il lui fallait encore un peu de temps et qu'enfin, il cesse d'autant douter de sa valeur. La soirée était un premier pas et un défi dont il avait préféré amoindrir le caractère pour ne pas gâcher l'événement. Karl voulait que cette soirée à défaut d'être parfaite, puisse au moins frôler la perfection et en aussi bonne compagnie, il était fort à parier que l'échec ne serait pas une option. Lily faisait partie intégrante de sa vie maintenant et malgré le fait que cette romance soit encore toute fraîche, le sorcier – si l'on omet les quelques incertitudes – se sentait bien, assez pour faire des efforts et passé outre ce qu'on lui avait fait subir. Et à la grande surprise de l'intéressé, tout se passa bien, l'ambiance n'était pas encore des plus chaleureuses, des regards incrédules venant rappeler l'étrangeté de cette relation, mais à l'inverse certaines personnes – des proches de Lily – avaient fait l'effort de venir à sa rencontre. C'était bref, mais suffisant pour une première fois. Les regards cessèrent bien vite de peser sur le couple, qui s'amusa sur la piste en compagnie d'autres jeunes sorciers. Karl, qui n'était pourtant pas un excellent danseur, se prêta au jeu de bonne grâce sans jamais quitter Lily du regard. Ils s'amusèrent, car ni l'un ni l'autre – excepté pour le slow – ne se prenaient au sérieux. Karl, goûtant pour la première fois – à l'académie – à la légèreté, s'autorisa à oublier tout ce qu'on avait pu lui faire subir pour ne garder que ce moment en tête. Un moment hors du temps, déconnecté des autres, qui permit aux deux jeunes sorciers de ne pas le voir passer ce temps qui leur appartenait. La fête étant sur le point de s'achever, les deux amoureux consentirent à mettre les voiles pour regagner le domicile des Johnston, délesté de leur présence en cette soirée si spéciale.
« - Quel affront ! Comment as-tu pu oublier ce pauvre Maze ? » laissa-t-il entendre avec humour tout en percevant la présence de son familier rôdant à quelques mètres, privilégiant ainsi l'obscurité à la lueur des réverbères. « - Il n'est pas encore très causant pour le moment. J'imagine que c'est comme ça au début, on apprend à se connaître, à s'apprivoiser. J'ai lu que les loups n'avaient pas un caractère facile. Ce sont des solitaires. » Et il est vrai que depuis l'apparition de son familier dans sa vie, Karl avait pas mal potassé sur le loup, en témoignaient ses récents et nombreux emprunts à la bibliothèque. Avoir un tel animal comme familier relevé presque de l'onirisme pour le jeune homme qui avait toujours été fasciné par cet animal et se sentait connecté à lui sans trop savoir pourquoi. À présent, pourvu d'une prémisse d'explication, il se plaisait à imaginer que ce n'était pas le fruit du hasard. « - Je suis content de l'avoir à mes côtés, même si... » Il marqua un long silence en songeant à ce qui était arrivé l'année passée, au cours d'une nuit de mai somme toute banale pour la tête de Turc qu'il était, mais qui aurait pu virer au drame avec l'émergence d'un imposant loup gris. « - Il n'a fait que me défendre. Je devrais me contenter de retenir ce fait. » Mais au fond de lui, l'espace d'un instant – aussi infime soit-il – il avait ressenti de la satisfaction en voyant ses assaillants, ainsi mis à mal. Une pensée qu'il chassa rapidement de sa tête, pour reporter toute son attention sur Lyanna et sur son absence de connaissance en termes de sorts de téléportation. « - Les sorts les plus complexes sont effectivement traités en dernière année. J'imagine qu'il faut atteindre un degré de pratique suffisant et la maturité qui va avec. Et puis vu ce que nous avons été capable de faire dans le lac ce matin, je préfère attendre pour tester à nouveau le moindre sort en ta compagnie » lança-t-il plus moqueur que jamais. Il était incapable de se l'expliquer, mais ce qu'il ressentait pour cette jeune femme était incomparable à ce qui avait déjà pu ressentir pour une fille et ce n'était pas faute d'avoir eu plusieurs béguins et petites amies lorsqu'il était encore scolarisé chez les mortels.
Elle était ce que les autres n'étaient pas, spéciale et il avait beau la regarder sous tous les angles, elle demeurait spéciale et il ne se lassait pas de ce mystère. Ainsi, ils regagnèrent l'imposante demeure des Johnston, que Fitz découvrait pour la toute première fois. « - Je suis impressionné ! Mademoiselle Johnston vit dans un véritable palais à ce que je vois. Mais... j'hésite à entrer voyez-vous très chère.. Si vraiment, tu as utilisé un philtre d'amour, tu pourrais aisément profiter de moi. » Mais il consentit à entrer et à l'entendre démonter cet argument qu'elle avait elle-même lancé. Ce qui valut à Karl un léger éclat de rire « - J'ai le droit de te dire que malgré ton insolente beauté, tu es pourvu d'un humour pourri ? » renchérit-il pourvu d'un regard aussi intense que la passion qui menaçait de les emporter. « - J'aime les visites rapides, surtout quand il est question du salon » Il se laissa faire et prit place sur l'un des fauteuils tandis que Lyanna capturait ses lèvres avec audace. « - Très cool pour la poussière et pratique » Il eut tout juste le temps d'achever sa phrase, que la sorcière se rua à nouveau sur lui pour l'embrasser avec passion. « - Et ta mère aurait-elle mis un sort pour nous empêcher de faire des bêtises ? » Il l'incita à venir se mettre à califourchon sur lui. « - Je ne sais pas pour toi, mais je commence à avoir chaud... Peut-être que ça vient des quelques verres de punch... » Son regard ne trompait personne et l'envie d'aller plus loin, malgré ce qui semblait être un premier rendez-vous, prédominait presque sur la raison sur jeune sorcier. « - Peut-être qu'on devrait... attendre ? » finit-il toutefois par faire entendre, se surprenant lui-même.
Lily était ravie, la soirée s’était passée à merveille pour Karl, et à présent ils finissaient en beauté en rentrant chez elle, tranquillement sur leur nuage. L’ambiance était joyeuse entre eux, ils plaisantaient tout en parlant quand même de sujets intéressants comme les familiers. Lily n’en avait pas encore puisqu’elle n’était qu’en première année et pas encore atteint l’âge buttoir de quinze ans, mais sa curiosité à ce sujet était grande, malgré tout ce qu’elle avait pu lire sur le sujet. Elle eut un petit rire quand Karl s’offusqua faussement de son « léger » oubli de Maze qui, apparemment, les surveillait de loin.
- Mille excuses Maze, si tu m’entends… ajouta-t-elle alors en souriant.
Karl répondit à sa question, affirmant que pour le moment ils n’avaient pas de grandes conversations tous les deux.
- Tu sais que le loup n’est qu’une apparence qu’il s’est choisi pour être avec toi, et qu’en vrai c’est un gobelin des forêts, n’est-ce pas ? Je veux dire, son caractère lui est propre, ce n’est pas vraiment un loup. Bon ça veut pas dire qu’il faut lui donner de la crème glacée et des pop corns, à mon avis, ça va pas lui faire du bien, ajouta-t-elle en faisant mine de réfléchir. Donc ça en fait plus pour nous !
Lyanna essayait de détendre l’atmosphère, sentant que Karl culpabilisait encore à propos de ce qui s’était produit l’année passée. Maze avait surgi pour défendre son jeune sorcier qui se faisait malmener.
- Hey, il faut que tu arrêtes d’y penser en culpabilisant. Ces types qui t’emmerdaient, eux, ils ne culpabilisaient pas, dit-elle en reprenant un air sérieux. Maintenant, tout est arrangé, personne ne te fera plus de mal à l’académie. C’est ce qui compte. Il faut aller de l’avant, Fitz ! dit-elle en souriant de nouveau, essayant de se montrer encourageante.
Cela fonctionnait puisque le jeune homme se mit à plaisanter sur leurs exploits du matin-même. L’adolescente s’empressa de lui mettre une petite tape sur le bras en riant.
- Hey ! Je suis sure que si je veux, je suis meilleure que toi ! Et puis les sorts complexes ne sont qu’en dernière année parce qu’effectivement c’est probable qu’on n’ait pas assez d’énergie pour les gérer avant. Tu sais que certains sorciers qui abusent des sorts complexes vieillissent prématurément, ou se retrouvent en mauvaise santé ?
Ses parents l’avaient mise en garde un nombre suffisant de fois pour que la demoiselle sache reconnaître ses limites quand elle serait à même de pratiquer. Et c’est ce qu’elle faisait. Ils arrivèrent donc devant la maison des Johnston et Lily était ravie de pouvoir lui montrer ce lieu qui l’avait vue grandir, bien que, à peine entrés, c’était plutôt la passion qui l’emportait, davantage que l’envie de lui faire une réelle visite guidée. Elle se tourna vers lui, ravie de le voir rire.
- Je ne vais retenir que le « insolente beauté », parce que mon humour, figure-toi, n’a rien à envier à tes goûts musicaux. Et tout le monde rit toujours à mes blagues, môssieur, lança-t-elle en s’avançant vers lui pour lui voler un baiser.
Bien vite, ils se retrouvèrent sur l’un des fauteuils du salon où Lily avait fait prendre place son petit ami avant de s’installer sur lui pour continuer à dévorer ses lèvres avec passion, entrecoupant ses baisers d’une explication sur le sort lancé par sa mère, histoire de, pour la forme. Elle regarda Karl d’un air amusé suite à sa question.
- Ah non, le sort anti-bêtises, c’est mon père qui l’a lancé. Si tu touches à mes sous-vêtements, tu reçois une décharge, déclara-t-elle le plus sérieusement possible avant d’éclater de rire.
Elle entrelaça ses doigts dans les siens, hochant la tête.
- Oui, je trouve qu’il fait chaud aussi et je crois pas que ce soit le punch… dit-elle avant de lâcher sa main pour venir déboutonner la chemise qu’elle lui avait choisie quelques heures plus tôt.
Lily s’arrêta cependant lorsque son chéri balbutia quelque chose comme « attendre ». Surprise, elle posa son regard dans le sien avant d’apposer ses mains délicatement sur ses joues. - Tu es un gentleman, Karl Fitz.
Elle se retira de sur lui pour se lever.
- Je te propose une chose. Je vais prendre une douche, et après on voit si on est assez fatigués pour dormir tout de suite, ou discuter. Ça te va ?
Elle lui tendit la main et l’entraîna dans l’escalier pour lui montrer sa chambre et la salle de bain attenante. Elle retira ses chaussures, descendant de cinq centimètres, et lui tourna le dos. - Tu veux bien m’aider avec la fermeture éclair, s’il te plaît ? demanda-t-elle avec douceur en récupérant ses cheveux qu'elle mit sur le côté, dégageant sa nuque.
Plus il passait du temps avec la jeune Lyanna et plus Karl se laissait happé par la fascination. Elle avait beau être un peu plus jeune et avoir tout le monde à ses pieds, la demoiselle n'en demeurait pas moins accessible, plus encore avec lui et il ne boudait pas son plaisir. Bien que, dans un coin de sa tête, Fitz continuait à se demander ce qu'elle pouvait bien lui trouver et si cela était appelé à durer ? N'allait-elle pas vite finir par se lasser de lui et de sa banalité ? Une banalité qui par chance, n'était pas si affligeante que cela lorsqu'il était question de familier et celui de Karl n'avait pas son paraître pour impressionner lorsqu'il se présentait à vous. « - Je sais tout ce qu'il y a à savoir sur les familiers crois-moi. Je ne compte plus les ouvrages que j'ai parcouru sur le sujet. J'étais tellement désespéré qu'il tarde à arriver, que j'ai tenté de l'invoquer un bon nombre de fois. Mais ça n'est pas comme ça que les choses fonctionnent. C'est dans l'ordre naturel et il ne faut pas le bousculer. » Il est vrai que l'année passée Karl s'isolait systématiquement dans la bibliothèque pour trouver des réponses à sa myriade de questions concernant les familiers. Il voulait tout savoir de ces créatures si particulières qui se devaient d'accompagner les sorciers dans leur vie trépidante. « - Les gobelins n'en demeurent pas moins de fascinantes créatures qui dédient finalement leur vie à la nôtre et qui nous permettent également d'économiser sur la crème glacée » tenta-t-il pour faire de l'humour à son tour, bien qu'il ne soit pas encore assez à l'aise pour revendiquer totalement ce trait d'humour. Il voulait juste faire comme Lyanna, qui à l'inverse de lui, semblait plus à l'aise, assez pour ne pas avoir peur de se prendre un four. Mais au-delà de l'envie de juste faire rire, le jeune sorcier sentait que sa dulcinée cherchait à le faire déculpabiliser, car si le sujet « familier » s'était avéré passionnant de prime abord, le rappel de la première rencontre avec son familier, ravivait encore les appréhensions de Karl qui se rappela également l'échange qu'il avait eue avec sa mère le jour suivant. Se reprochant d'être une mauvaise personne, car il avait hésité avant d'ordonner au loup de cesser ses attaques. Une hésitation qui, selon lui, aurait pu coûter la vie à ses détracteurs. Lyanna, comme Penelope Fitzgerald, mit tout en œuvre pour que la culpabilité qui étreignait Fitz, ne soit plus qu'un mauvais souvenir.
Preuve que cela marchait, Fitz joua encore la carte de l'humour avec cette fois un peu plus de confiance allant même jusqu'à charrier la jeune sorcière qui n'avait pas son pareil pour riposter. « - Tu sais, la compétition ce n'est pas ce qui m'anime. Alors, tu peux être meilleure que moi si tu le désires. Et toi savais-tu que certains sorciers peuvent se consumés s'ils ne maîtrisent pas leur magie ? Il y a des précédents dans l'Histoire, mais c'est sûrement la magie noire qui a fait le plus de dégâts. Ma mère dit toujours qu'un sorcier orgueilleux court à sa perte. Il faut accepter l'échec et faire preuve de patience quand nous sommes jeunes. » Il parlait avec beaucoup de sagesse pour son âge, une sagesse que lui avait inculqué Penny en le préparant, plus jeune, au monde magique tandis qu'il côtoyait encore des mortels. Ce fut une période difficile que celle de devoir les quitter pour suivre une autre voie tout en gardant ce secret pour lui. Une difficulté plus grande encore avec ce qu'il avait subi et le fait que ces chers amis humains soient vite passé à autre chose. « Va de l'avant ! » n'avait eu de cesse de répéter Penny. Et c'est ce que le jeune Fitz faisait aujourd'hui en compagnie de Lyanna. Il acceptait de refermer une porte pour en ouvrir une le menant cette fois sur un chemin moins tortueux, du-moins, c'est ce qu'il espérait.
Les choses sérieuses prirent le pas sur la raison bien vite, peut-être trop lorsque Karl se retrouva au-dessus de Lyanna éclairée seulement par le ballet chatoyant des flammes virevoltant avec passion dans l'âtre de la cheminée. « - Attends ! Ton père a vraiment lancé un sort pour qu'on ne touche pas à tes sous-vêtements ? » demandait-il naïvement avant que l'intéressée n'éclate de rire. « - Je suppose que c'est un non ? » La passion continua toutefois à faire son œuvre. La chaleur n'était plus qu'un prétexte à se dévêtir et la main de Lyanna migra sur les boutons d'une chemise qu'elle avait aidé à choisir sans que ses lèvres ne quittent celle de Karl qui malgré l'envie d'aller au-delà des baisers et des caresses, refréna ses ardeurs. « - Non, je ne suis pas un gentleman, juste quelqu'un qui ne veut pas t'obliger à aller trop vite si ce n'est pas ce que tu veux. » La demoiselle reprit une distance convenable sans toutefois échapper au regard brillant de son jeune compagnon. Jamais encore, il n'avait été saisi de la sorte par une fille, une fascination qu'il préféra taire au risque de passer pour un idiot. Il se contenta juste d'acquiescer à la proposition qui venait de lui être faite « - Ca me va ! » Il saisit la main qu'elle venait de lui tendre et se leva à son tour du canapé pour rejoindre l'escalier et découvrir la chambre qu'ils allaient sûrement partager. Lyanna en profita pour se déchausser et perdre de sa grandeur ce qui fit sourire Fitz qui en profita pour se rapprocher alors qu'elle lui tournait le dos pour qu'il l'aide à se défaire de sa robe. Il abaissa donc la fermeture éclair avec douceur tout en laissant son souffle chaud parcourir la nuque dénudée de la jeune sorcière. « - On dit que tout ce qui est petit est mignon ! » Il sourit et la laissa se retourner pour encrer son regard dans le sien et la pourvoir d'un baiser empli d'une douceur déconcertante. « - Je t'attends ! » murmura-t-il alors que ses lèvres étaient encore apposées aux siennes. Il lui offrit ensuite un dernier sourire avant de rejoindre la chambre de la demoiselle. Était-il vraiment ici ? Tout cela était réel ou n'était-ce qu'une odieuse tromperie qui prendrait fin au meilleur moment ? Par réflexe, le sorcier se pinça pour ensuite se frotter les paupières. Non, il ne rêvait pas, il en était certain, sinon quoi, il se serait déjà réveillé depuis longtemps.
Lyanna se découvrait de plus en plus de points communs avec son nouveau chéri, si bien que leur relation lui semblait durer depuis des mois alors qu’ils étaient ensemble depuis moins de vingt-quatre heures. La jeune sorcière ne put s’empêcher de sourire.
- Toi aussi ? Cet été j’ai dévoré au moins trois livres sur les familiers ! Tu as lu le traité qui date de 1856 écrit par une sorcière de Salem ?
La brunette hocha la tête.
- Mais oui, l’invocation n’a lieu qu’une fois dans une vie, et des lunes de sang il n’y en a que deux fois par an, très cher. Mais je ne peux que comprendre ton impatience, j’ai tellement hâte que mon tour arrive !
Lily eut un petit rire à la blague de Karl qui reprit la sienne avec la crème glacée. Néanmoins, le caractère ambitieux de l’adolescente reprit le dessus quand Fitz s’amusa à la charrier sur son échec, ou plutôt demi-échec, avec le sort de lévitation.
- Être le meilleur n’est pas juste une question de volonté. On peut vouloir des tas de choses sans jamais les obtenir. Ce qu’il faut, c’est du travail et de la persévérance. Mais oui, je sais tout ça, ne t’en fais pas, le rassura-t-elle.
L’adolescente ne put s’empêcher de sourire. Karl parlait avec tant de discernement et de philosophie pour un sorcier de son âge. Cela ne lui donnait que plus de charme. Cela dit, Lily n’était probablement pas très objective. Elle était tout simplement raide dingue de Karl et quoi qu’il ait pu dire lui aurait semblé charmant. Bien vite, ses lèvres ne quittaient plus les siennes et l’ambiance s’était considérablement réchauffée, et chacun d’entre eux l’avait remarqué. La jeune fille y alla d’une petite blague à propos d’un sort soi-disant lancé par son père et ne put retenir un éclat de rire face à la mine déconfite de son petit ami.
- Bien sûr que non, voyons. Tu es trop mignon, dit-elle en riant.
Elle lui vola un nouveau baiser. Elle était comme envoûté par ce garçon qui lui avait plu dès le premier regard malgré les on-dit dont il était victime. Elle, elle avait su voir au-delà de tout ça, déceler en lui sa véritable personnalité et elle se félicitait d’heure en heure d’avoir eu cette sagesse d’écouter son instinct. Pour l’heure, son instinct lui dictait beaucoup moins de sagesse cependant et Karl fut celui qui décida de calmer un peu le jeu. A la fois surprise et admirative, Lily lui fit remarquer qu’il était d’une rare courtoisie pour un jeune homme de son âge. Elle ne put que sourire à sa réponse.
- Crois-tu vraiment que qui que ce soit puisse m’obliger à faire quelque chose que je ne voudrais pas ?
Néanmoins, la brunette obtempéra et prit sa main pour l’entraîner à l’étage. Une fois qu’elle lui avait présenté sa chambre, elle lui demanda un peu d’aide pour dézipper sa robe. Elle sourit à la remarque de Fitz et son souffle chaud dans sa nuque. Elle se retourna et ils échangèrent un nouveau baiser emprunt de douceur. Elle se sentait si bien avec lui, comme si leurs destins étaient liés.
- Fais comme chez toi Fitz, lança-t-elle alors qu’elle gagnait la salle de bain attenante à sa chambre.
Une fois la porte refermée, elle laissa glisser sa robe au sol avant de la mettre dans le panier à linge et fit couler l’eau de la douche. Le sourire ne quittait plus ses lèvres. Karl était ici, chez elle avec elle, Lily se sentait comme sur un nuage. La buée envahissait peu à peu le miroir et, pressée de retrouver son chéri, elle s’empressa d’entrer dans la cabine de douche à l’italienne et prit une bonne douche. Sa peau satinée sentirait bon la pêche. Une fois sortie, entourée d’une serviette de bain, elle se brossa les dents, puis les cheveux et entreprit de trouver une tenue de nuit qui ne faisait pas trop « enfantine ». Elle opta pour quelque chose à mi-chemin entre la nuisette et la chemise de nuit classique, ni trop olé-olé ni trop classique. Elle retourna dans sa chambre pour retrouver Karl, tout sourire, et vint s’asseoir au bord du lit avec lui.
- J’ai pas été trop longue ?
Elle ne résista pas bien longtemps à l’envie de l’embrasser à nouveau. Il lui faisait l'effet d'une friandise à laquelle il était bien trop difficile de résister.
Comment était-ce possible ? Certains – les mauvaises langues – diront qu'ils se connaissent à peine, mais pour Karl, la facilité avec laquelle il échangeait avec Lyanna, donnait l'impression – aussi factice soit-elle – qu'ils se connaissaient depuis des semaines, peut-être même des mois... Non des années. Oui, aussi fou que cela puisse être, Karl avait l'impression de connaître la jeune adolescente depuis toujours. Et il lui souriait à présent avec tant de facilité, qu'il se demandait encore pourquoi il lui avait fallu subir autant de mésaventures avant d'enfin la rencontrer. « - C'est un sujet tellement fascinant. Le traité de 1856 étant intéressant puisqu'il émanait du point de vue d'une sorcière, mais l'article de James Sharpe dans « The Encyclopedia of Witchcraft » était lui aussi intéressant. Bon, j'avoue avoir moins apprécié le terme « folkloristes » mais je préfère ça à hérétique. Son article a permis l'émergence de plusieurs travaux par la suite. Entre-autre des ouvrages descriptifs sur nous et nos familiers. J'apprécie toutefois l'ironie concernant l'engeance magique Sharpe, pas le plus vaillant d'entre nous, je te le confirme. Il a préféré se faire passer pour être non-magique et à de temps à autre dénigrer les siens pour ne pas attirer les regards et finir sur un bûcher. Pour le courage, on repassera ! Mais toi, savais-tu qu'avant de les appeler « familiers » on les nommait « niggets » ? Dans les années 1900, on les décrivait comme des « bestioles ou des choses que les sorcières gardent tout le temps avec elles » La définition est sommaire, mais pour l'époque, on peut leur pardonner les approximations. Mais pour ma part, je te conseillerai, si tu ne l'as pas lu « The Witch Cult in Western Europe » de Margaret Murray. C'est intéressant ! »
Il était intelligent, elle aussi, c'était indéniable, mais ni l'un ni l'autre ne cherchait à se surpasser. La rivalité n'avait lieu d'être et puis Karl se fichait pas mal qu'elle soit plus intelligente que lui. Au contraire, avoir quelqu'un comme lui – qui plus est d'aussi agréable à écouter et à regarder – était une chance qu'il n'était prêt à laisser s'envoler, pour rien au monde. Et lui qui pensait avoir trouvé, en la solitude, la compagne idéale, révisait présentement sa copie. L'idéal avait un nom, Lyanna et jamais Karl ne se lasserait de le prononcer, du moins c'est ce qu'il croyait à l'époque. Mais peut-on vraiment lui en vouloir d'avoir été naïf ? Lyanna était son premier grand amour (le seul) et se pourvoyait dès lors de tous les attributs de la perfection et tant pis pour l'objectivité. Il est vrai que la jeune demoiselle était parfaite et le bougre qui s'aventurerait à penser le contraire ferait montre de mauvaise foi sans bornes. Mais que l'on se rassure, Karl bien que littéralement sous le charme de la sorcière et sentant peu à peu l'excitation l'envahir à mesure que les baisers redoublaient en intensité, parvint toutefois à faire montre d'une retenue toute à son honneur. Il ignorait si Lily était encore vierge, mais dans le doute, il préférait s'abstenir d'aller trop vite, pour ne rien lui imposer. Puis étant patient de nature, il ne voyait pas cela comme une contrainte et semblait prêt à attendre le temps qu'il fallait avant d'aller au-delà des baisers et des caresses.
« - Il n'est pas encore de ce monde celui qui essaiera te t'obliger à faire quoique ce soit et je plains d'avance celui ou celle qui essaiera. » Le sourire charmeur, il accepta de délaisser la passion pour suivre la demoiselle jusqu'à l'étage et ainsi découvrir une autre part de son monde par le biais de sa chambre. D'ailleurs il ne manqua point l'occasion de lui faire savoir qu'il appréciait la pièce avant de venir l'aider à se défaire du zip de sa robe. « - Si je puis me permettre, je trouve ça idiot de mettre le zip à l'arrière, sauf bien sûr si les demoiselles qui portent de telles robes ont un chevalier servant à portée de main » Il lui sourit de plus belle lorsqu'elle se retourna pour lui faire face avant de sentir ses lèvres se perdent avec une infinie douceur contre les siennes. « - Je vais donc faire comme chez moi ! » Il ne quittait pas son regard tandis qu'elle commençait déjà à s'éloigner pour atteindre la salle de bains. Assis sur le lit, le sorcier ne résista pas bien longtemps à l'envi de se lever pour faire le tour de la pièce. Il remarqua un cadre photo sur la table de chevet. Le cliché laissait paraître une Lily bien plus jeune entourée certainement de ses parents. « - Bonjour Mr et Mrs Johnston, moi, c'est Karl ! » lança-t-il à la photo avant de se rendre compte qu'il était ridicule. Il reposa de ce fait le cadre et continua son exploration. La demoiselle avait une bibliothèque richement fournie. La magie entre autres avec divers ouvrages, mais aussi quelques romans et pièces de théâtre. « - Wow ! » Laissa-t-il échapper en attrapant du Shakespeare avant de remarquer l'existence d'un walkman sur le bureau. Conscient d'être un peu trop curieux, le jeune sorcier retourna sur ses pas et retira ses chaussures avant de retrouver le lit confortable de sa dulcinée qu'il retrouva à peine cinq minutes plus tard pourvu d'une nouvelle tenue. « - Ca sent bon... De la pêche ? » La demoiselle ne se fit pas prier pour retrouver le garçon qui faisait tant battre son cœur. Une capacité qu'elle aussi exerçait sur celui de Karl qui passa une main sur sa joue avant de saisir une mèche rebelle pour la glisser derrière son oreille.
« - Je ne t'ai pas chronométré, mais j'ai eu le temps de faire le tour de la chambre » laissa-t-il entendre avec une pointe de moquerie histoire de la titiller un peu maintenant qu'il était en confiance. « - Mais je crois que ça .... » Il n'eut pas le loisir de terminer que déjà les lèvres de la demoiselle partaient à l'assaut des siennes. Il se détacha lentement sans pour autant mettre de la distance, leurs visages étaient d'ailleurs si près qu'ils pouvaient mutuellement sentir le souffle chaud de l'un sur l'autre. « - Je disais que je crois que ça valait la peine d'attendre » Il l'embrassa à son tour, visiblement incapable de laisser ses lèvres éloignées des siennes trop longtemps. Il s'allongea ensuite, obligeant la demoiselle à en faire de même. « - J'ai vu que tu avais une sacrée bibliothèque, mais aussi un Walkman sur le bureau. Il faudra que je pense à te faire une cassette compilant toutes mes chansons kitsches préférées. » Ils continuèrent à parler de choses et d'autres pendant encore plusieurs heures. Forcés de constater que le temps, lorsqu'ils étaient ensemble, ne semblait avoir aucune emprise sur eux. Tellement qu'ils furent surpris de voir les rayons du soleil pénétrer la chambre. Ils échangèrent un dernier regard puis un dernier baiser avant de s'endormir dans les bras l'un de l'autre. C'était magique ! Il n'y avait pas d'autre mot.
C’était tellement incroyable, Lyanna avait l’impression de rêver : ce garçon était parfait en tous points, du moins selon ses critères. Il partageait sa passion des familiers et avait lu les mêmes ouvrages qu’elle.
- Tu m’ôtes les mots de la bouche, j’allais te parler de l’encyclopédie aussi. On a les mêmes références.
L’un et l’autre étaient cultivés pour leur jeune âge et s’intéressaient à beaucoup de choses tout en sachant s’amuser, et c’était appréciable de rencontrer quelqu’un comme soi. Lily apprécia le côté gentleman de Karl, bien qu’elle n’aimait pas qu’on la materne. Elle avait appris à être indépendante et aimait bien cette liberté.
- J’ai pas besoin d’être protégée tu sais. Comme tu dis, la personne qui voudrait me contraindre à quoi que ce soit est plus à plaindre que moi.
Elle fondait face à ce sourire, c’était indéniable. Karl lui plaisait plus qu’aucun garçon au monde. Une fois l’étage et la chambre de Lily atteints, le jeune homme fit remarquer que l’emplacement des fermetures des robes n’était pas très pratique, ce qui fit rire la jeune sorcière.
- C’est sûr que ça demande un peu de contorsion quand on est seule, c’est pour ça que j’ai profité de tes charmantes mains pour m’aider.
Puis, elle s’éclipsa pour prendre une bonne douche et se préparer pour la nuit. Elle était revenue, amusée que son chéri ait reconnu l’odeur du gel douche, et bien vite, ils s’étaient retrouvés tous les deux allongés à parler de tout et de rien avant de sombrer dans le sommeil aux premières lueurs du jour.
Quelques semaines avaient passé, Karl était désormais totalement intégré dans le petit groupe de Lyanna et avait fait plus ample connaissance avec ses amis de première année dont Elisabeth Black et Bradley Spencer. Désormais, tous les élèves de l’académie savaient que Karl Fitzgerald était le petit ami de Lyanna Johnston et qu’il était de ce fait exclu de lui chercher des noises. La quiétude régnait donc et Lily était de plus en plus amoureuse, n’ayant d’yeux que pour son petit ami et n’ayant que son prénom à la bouche lorsqu’il n’était pas là.
Le jeune homme avait eu l’occasion de trouver les petits mots que sa jeune chérie avait semé dans sa chambre lors de sa première visite chez les Fitz. Ce week-end-là, Penelope avait accepté que Lily vienne dormir chez eux, lui épargnant une fin de semaine de solitude à l’académie avec les quelques élèves qui eux aussi avaient des parents qui habitaient trop loin pour rentrer chez eux.
Pendant que les élèves quittaient l’académie en ce vendredi soir, Lily était dans sa chambre à finir de préparer son sac pour le week-end. Elle avait pris un bouquet de fleurs pour la maman de Karl et attendait que ce dernier la rejoigne pour qu’ils rentrent ensemble. La chambre d’ordinaire partagée avec deux autres filles qui étaient devenues les meilleures amies de Lyanna, était désormais vide. Alors qu’elle fermait le zip de son sac à dos, elle entendit la porte s’ouvrir et, sourire aux lèvres, elle se jeta dans les bras de son petit ami.
- Tu m’as manqué depuis la pause déjeuner !
Sans attendre, elle scella ses lèvres aux siennes dans un langoureux baiser.
Pour Karl, la beauté était un critère important, mais pas aussi primordial que l'intelligence. De toute évidence, Lyanna Johnston était pourvue de ces deux qualités. Une chance pour Karl qui désespérait, en plus de sortir du marasme dû aux brimas, de trouver quelqu'un à même de le comprendre et de partager avec lui des sujets de conversation aussi variés que l'historique des études sur les familiers. « En plus, nous avons les mêmes références. Si ça, c'est pas dingue ! » Autant que d'avoir foulé le sol menant à la propriété des Johnston, qui n'étaient pas au complet ce soir. Une chance pour le Karlito qui prenait un peu plus ses marques, sans la timidité qui aurait été de rigueur face aux parents de Lyanna. Malgré la confiance qu'il prenait à chaque baiser, le sorcier tâchait d'amoindrir ses ardeurs pour ne rien précipiter, lui qui avait déjà vécu la grande aventure de « la première fois » contrairement à ce qui pouvait se dire dans son dos. Lyanna méritait d'être traitée avec respect et valait amplement le temps d'attendre, si d'aventure, elle ne s'était pas encore donnée à un garçon. Karl ne désespérait pas d'être le premier à lui offrir la plus belle des nuits et ainsi donner à leur lien une force qui serait difficile à briser. « - Mais même si tu n'as pas besoin d'être protégé, rien ne m'empêche de t'emmener sur le cheval blanc que je n'ai pas. » Il n'avait d'ailleurs pas, selon lui, les attraits du prince charmant, mais demeurait prêt à toutes les folies pour sa dulcinée, et ce, malgré le fait qu'il ne s'agisse que d'une relation naissante. En de telles circonstances, il est évident que nous avons tendance à enjoliver les choses, à faire preuve d'une naïveté certaine qui nous aveugle au point de faire disparaître les défauts de l'un et de l'autre, mais Karl avait l'intime conviction qu'il ne se lasserait jamais, qu'il n'aurait de cesse de poser sur elle, le même regard, que cet amour naissant ne se consumerait point. Il savait que c'était elle, bien qu'il soit incapable de dire pourquoi. Le pauvre, il était loin de se douter que cela ne durerait que trois ans et qu'on ne lui laisserait que trop peu de choix, voire aucun.
Ce fut donc leur première nuit ensemble et l'on s'en doute, pas la dernière. Les jours passèrent, puis les semaines. Le temps, qui jadis, traînait trop en longueur pour le pauvre Karl qui attendait les vacances comme une délivrance, revêtait désormais des atours bien plus agréables. Il faut dire que la présence d'une certaine Lyanna y était pour beaucoup. Elle avait littéralement changé sa vie, à tel point que le temps passé à Ravenwood n'était plus un fardeau, mais bel et bien une délivrance. Droit et fier, il ne baissait plus le regard, d'ailleurs rares étaient ceux et celles qui cherchaient à le provoquer. Certes, il était désormais le petit ami d'une des filles les plus populaires de l'académie, mais Fitz avait très largement fait ses preuves. Sa popularité nouvellement acquise lui avait même permis d'être élu représentant de sa classe, le pourvoyant d'encore plus de responsabilités, un rôle qu'il prenait à cœur, tout comme celui de petit-ami. Attentionné, il ne manquait la moindre occasion de faire plaisir à Lyanna et moins timide, il était parvenu à intégrer le petit groupe d'amis de la demoiselle. D'ailleurs, il appréciait ces moments passés avec entre-autre Miss Black et Spencer un brave type qu'il appréciait au point de l'aider lorsqu'il était en difficulté. Du Karl tout craché !
Mais pour l'heure, ce n'est pas la prochaine interrogation qu'il préparait avec hâte, mais bel et bien le week-end à venir. Se refusant à voir Lyanna restée à l'académie, alors que la plupart des élèves regagnaient leur domicile, Fitz avait négocié avec ses parents et plus précisément sa mère, Arthur était absent, pour que sa chérie vienne passer le week-end dans la demeure familiale. Une négociation qui n'en fut pas vraiment une puisque le jeune sorcier n'avait même pas eu besoin de développer ses arguments pour entendre sa mère lui dire « oui » Pour dire vrai, elle était tellement heureuse de le voir comme ça qu'elle se voyait mal lui interdire de passer du temps avec la personne à l'origine de l'épanouissement de son fils. Karl s'activait donc à tout ranger dans sa chambre, prenant soin de faire son lit et d'ouvrir les fenêtres pour aérer. Il avait terminé plus tôt les cours ce vendredi et avait pu aider sa mère à faire les courses et à tout ranger. « Tu es pressée ? » lança Penelope en voyant Karl fixer intensément l'horloge. « - Ouais un peu. Je dois retourner chercher Lyanna à l'académie vers 17 h 30. » La sorcière se mit à sourire, c'est qu'elle le trouvait mignon comme ça, avant de lui demander depuis combien de temps les deux amoureux ne s'étaient pas vu. La réponse de Fitz fit rire sa mère « Effectivement trois heures, c'est long ! » lança-t-elle légèrement moqueuse.
« - Je peux prendre la voiture ? » Karl était en âge de conduire, il pouvait se permettre la demande « Si tu ne grilles aucun feu et ne dépasses pas les limitations de vitesse, ça peut le faire » Elle lui lança les clés « - Ca va le faire » rectifia-t-il en attrapant sa veste. Le trajet lui parut long et pour cause, la plupart des actifs rentraient du travail. Mais enfin, l'académie pointa le bout de son nez, au bout de la deuxième chanson sur la cassette qu'il venait d'insérer dans le lecteur. Le sorcier gara la voiture sur le parking et se précipita dans l'établissement quasi-dessert. Il accourut vers les dortoirs et grimpa deux à deux les marches avant d'enfin regagner la chambre de sa sorcière bien-aimée. « - Votre taxi est avancé » Il eut à peine le temps d'en dire plus qu'elle se précipita sur lui pour lui faire savoir à quel point il lui avait manqué. « - Il n'y a pas à dire, les pauses déjeuner du vendredi sont les pires » Il s'approcha à nouveau de ses lèvres pour que le baiser passe de langoureux à torride sous le regard médusé de la camarade de chambre. « J'vais finir par t'appeler Lily la dépravé ! » lança-t-elle pour la charrier avant que Karl ne récupère les affaires de sa chérie. « - Sois pas jalouse ! » renchérit Fitz en offrant un clin d'œil à la demoiselle tout en quittant la chambre. « - J'ai pris la voiture, ça nous évitera de prendre le bus. Il est toujours bondé à cette heure en plus. T'as passé une bonne fin d' aprem ? »
Qu’est-ce qu’on connaît de l’Amour à quatorze ans ? Certainement pas grand-chose, du moins pour la plupart des adolescents de cet âge. Mais Lyanna avait la conviction que l’Amour avec un grand A, pour elle, c’était Karl Fitzgerald. Elle n’avait désormais d’yeux que pour lui, son petit coeur s’emballait chaque fois qu’elle l’apercevait au détour d’un couloir, et même s’ils sortaient ensemble officiellement depuis cette fameuse soirée étudiante clandestine dans la forêt et que son coeur semblait « acquis », elle n’en demeurait pas moins toujours autant sous le charme et malgré les semaines qui s’écoulaient, ses sentiments semblaient se renforcer chaque jour un peu plus. Son sourire n’était pas le même lorsqu’il lui était adressé, c’était certain.
Le week-end promettait d’être parfait puisqu’elle serait avec lui. Ses parents, du moins sa mère, avaient accepté si gentiment qu’elle vienne dormir chez eux. Lily était touchée par la grande gentillesse de Pénélope qui lui rappelait beaucoup sa propre mère qui lui manquait, il fallait le reconnaître. D’ailleurs, elle appelait ses parents toutes les semaines pour les tenir au courant de son actualité, omettant évidemment de mentionner les soirées beuverie entre adolescents. Elle avait bien sûr parlé de Karl à sa mère. Son père avait un peu tiqué mais la mère de la jeune fille avait réussi à retenir son mari de faire un saut à l’autre bout du pays pour mettre en garde le jeune homme sur ses potentielles intentions. Cette histoire avait valu un bon éclat de rire à Lyanna et sa mère quand cette dernière l’avait raconté à sa fille.
Karl venait de la rejoindre dans sa chambre, faisant fi de l’interdiction pour les garçons d’aller dans les dortoirs des filles et vice versa. Après tout, le surveillant était affairé à vérifier qui sortait, il ne pourrait donc pas réprimander une petite intrusion. L’adolescente s’était empressée d’aller saluer son petit ami à sa manière, il répondit à son tour avec intensité au baiser avant qu’ils ne soient interrompus par la voix d’Elisabeth, dont Lily n’aurait pu prédire le retour. Elle qui était toujours si prévoyante, ce n’était pas son genre d’oublier ses affaires.
- Oups, désolée si on a choqué tes chastes yeux, ma chère ! lâcha-t-elle avec une pointe de taquinerie. Bon week-end Elis’ ! lança-t-elle joyeuse tandis que Karl attrapait le sac de sa bien aimée.
Celle-ci glissa sa main dans celle libre de son chéri et attrapa le bouquet de fleur de l’autre.
- C’est pour ta mère, j’espère que ça lui plairai. J’ai complètement oublié de te demander quelles étaient ses fleurs préférées…
Elle se sentit d’ailleurs un peu sotte pour le coup. La jolie brune eut un grand sourire en entendant que Karl avait eu le droit de prendre la voiture de ses parents. Ce serait la première fois qu’elle monterait avec lui en voiture.
- Tu peux déjà conduire, la chance ! Tu m’apprendras ?
Toujours avide d’apprendre ce qu’elle ne savait pas, Lyanna ne changeait pas. Puis elle répondit à sa question.
- Oui, on a enfin eu les notes des contrôles de la semaine dernière en Histoire de la sorcellerie et en potions. J’ai eu la meilleure note pour les deux disciplines, annonça-t-elle non sans fierté. Et toi, c'est pas trop fatigant d'être rentré chez toi pour revenir ici ? s'inquiéta-t-elle.
Ils sortirent enfin de l’enceinte, non sans saluer le surveillant, et retrouvèrent la voiture des Fitzgerald.
- Waow elle est tellement cool !
Ils montèrent à l’intérieur et elle boucla sa ceinture.
- Je suis désolée que tu doivent conduire dans les embouteillages… Si tu veux la prochaine fois on attend une heure ou deux avant de partir. Ah au fait, je sais que je m’y prends un peu tôt et que c’est que dans un mois, mais mes parents vont revenir pour les fêtes et je crois qu’ils aimeraient bien te rencontrer. Tu voudras bien venir dîner à la maison ? Enfin… t’es pas obligé de répondre tout de suite, hein, si tu es… occupé ou quoi… y a pas de souci.
Elle ne voulait pas qu’il s’y sente obligé. Elle savait que ça pouvait être intimidant pour un garçon de rencontre les parents de sa petite amie.
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