Le problème avec les soirées terrestres étaient qu’elles finissaient souvent trop vite. Ils avaient le boulot, l’école, les enfants, un tas de responsabilité plus ou moins barbante qui faisait bailler d’ennui la démone quand elle devait les écouter se plaindre, souvent elle lançait un sortilège pour qu’ils s’étouffent avec le contenu de leur verre afin de briser un peu leur élan. Ça marchait assez bien, puis elle changeait de sujet. Mais ce soir cela n’avait pas marché, elle c’était donc cassée, parce qu’elle n’avait pas que ça à faire d’écouter les problèmes des autres, non mais ho. Alcoolisée avec des restes de cocaïne, elle errait une bouteille de vin rouge à la main dans les rues silencieuses de Los Angeles, il devait être 4h du matin, l’heure ou la plupart des gens dormait et ou la plupart des fêtards étaient déjà rentrés. Les USA ça n’avait rien à voir avec les pays latins ou la fête se poursuivait souvent jusqu’à l’aube.
Complètement torchée, Besie se mit à chanter une chanson paillarde, en plus elle avait une très belle voix (véridique), ça allait forcément faire plaisir aux voisins, mettre un peu de piquant dans leur terne vie de mortel.  Son humeur s’améliora un peu, mais elle se lassa vite de ce petit jeu. N’ayant rien d’autre à faire elle vola une trottinette, avec sa force surhumaine ça n’avait rien de bien compliqué. Cheveux au vent elle déambula alors dans la ville sans avoir la moindre idée d’où elle allait. Puis elle perçut des bruits de pelle, oui des bruits de pelle et ça venait… ça venait d’un cimetière… en plein milieu de la nuit. Curieuse elle descendit de son véhicule et chercha l’entrée, il n’y en avait pas. Elle allait devoir escalader la clôture. Ce fut assez sport et si quelqu’un serait passé à ce moment-là, elle aurait été arrêté pour outrage à la pudeur, parce que sous sa courte jupe rouge il n’y avait rien. Une fois au sol, elle tira un coup sec dessus.

- Surprise ! hurla-t-elle, n’ayant pas encore repéré Solette.

Bruyamment elle bailla et donna un coup de pied dans un bouquet à portée de pied. De toute façon dans deux jours elle aurait un nouveau corps tout frais à sa disposition, alors autant faire ce dont elle avait envie avec celui-là et pourquoi pas de la profanation de cimetière. Elle ne dérangeait personne, les pauvres âmes étaient déjà en enfer, au paradis ou alors c’était cassé hanter d’autre lieu, parce qu’il y avait beaucoup mieux de traîner pour l’éternité dans un lieu aussi barbant.

- Bonsoir ? questionna-t-elle le vide, avant de commencer à avancer pour explorer les lieux.

Je regarde la lune. Elle est pleine. Elle est magnifique, et surtout porteuse de chance. Elle fait éclairage propice à mes petits exercices de minuit. Le cimetière, à cette heure, sont désertés de tous les crados et jeunes débiles qui aiment s'aventurer pour consommer ou forniquer. Je jure que si je trouve encore un condom usé moisi dans la terre, je fous ma pelle là et je me barre.

C'était des promesses sans grandes envergures, évidemment. Solette était au au jardin des cadavres cela faisait une poignée d'heure. Son visage était caché d'un bandanas sale et moche. Il y avait toujours un moment pour le rituel d'inauguration du déterrement illégal qui était composé d'un symbole de Lwas inscrit à la farine de maïs sur la terre du défunt, marqué d'incantations méthodiques. Ensuite, il ne fallait que creuser jusqu'à trouver cadavre. Tel les esclaves anciens se cachant dans la nuit pour célébrer avant que le soleil ne les dévoile, ce processus devait se faire sans qu'aucun rayon de soleil ne la touche. Elle regarda sa montre, et lâcha son instrument en herbe, sans aucune grâce.

Solette sortit un sachet de sa poche contenant de l'herbe séchée mauve et orange. Elle s'en roula habilement un joint qu'elle alluma et tira comme une gargantuesque cochonne. Pourtant, Dieu savait qu'elle avait fumé à longueur de journée son spécial mélange d'herbes cueillit et ensorcelé à la main.

Basile, lui, se promenait dans l'herbe et vaquait à la chasse aux souris, peut-être.

Tiens, quelque chose pour détendre les tensions de la journée! N'importe quoi... Y'a rien que je pourrais changer à ma condition de bâtarde pour rendre ma vie meilleure. Je fixe la lune, elle me vibre des paroles importantes. Même si je peux apprécier l'âme de la terre qui grouille sous mes pieds, et se rafraîchit de la décomposition de ses cadavres, je dois me magner. Notre Terre qui a sentit le sang giclé, qui a bu nos entrailles perdues...

Elle fredonnait cette vieille prière de chant que son arrière-grand-mère chantait toujours, sans s'en rendre compte. C'était héréditaire, il faut croire. Toujours le joint à la lèvre, la décidée continuait à creuser son trou. Son rythme était équilibré, stable et efficace. Comme toujours.

« Je sais pas ce qu'on va en sortir de celui-là, mais il a été enterré aujourd'hui. Cette fois, je vais me la taper l'incantation Ogun et Kalfu. Et avec notre chance, j'espère juste qu'il ne va pas chlinguer la couille de chacal comme celui de la semaine passée. Fils de chienne que je m'en passerais bien.  Peu importe, Basile, tu pourras plus te taper de ma gueule. Cette fois, je l'ai mon projet! [...] Basile! [...] Basile? »

« Surprise! »

Je sursaute si fort que je sens ma colonne vertébrale courbée claquer. J'en lâche ma pelle et mon joint. Je ne ramasse que le joint, rapidement, vite, et je me redresse.

« Saleté de chienne de pute! »

Je peste fortement de colère en me retournant. C'est quoi l'idée stupide de sursauter un pilleur de tombe, merde?! Je me questionne sur la provenance du cri, et surtout à quel point sa bouche était loin. Je scrute mon horizon restreint. Je vois Basile ramper vers moi, nonchalament.

« Je ressens une tierce présence avec nous. »

Je lui donne un visage si pompé que je sentais qu'il exploserait d'un instant à l'autre. Il fait exprès ou quoi?! Je lui montre le poing, comme seule réplique, et je fronce les sourcils en continuant voyant au loin un bouquet de fleur voler doucement. S'en continue des bruits de pas. Mon oreille les suit comme un prédateur à la recherche d'un mouvement.

« Bonsoir? ? »

Je discerne, plus loin dans l'obscurité, une femme en silhouette. Basile se rapproche de moi et grimpe en ondulant sur mes épaules. Il siffle avec la perspicace intention de peut-être attaquer. Je jappe, en gesticulant à ma bonne manière arrogante :

« C'est quoi l'idée de déranger quelqu'un dans un cimetière à cette heure? T'es cinglée ou quoi?! »

Et plus elle s'approche, plus je ressens qu'elle n'est pas humaine. Qu'elle n'a rien d'humaine, sinon sa silhouette. Mais de fort. Je ne sais pas quoi. Mais ça me chicote, putain...

« Peut-être serait-il temps d'admettre que vos choix de paroles étaient peu judicieux, cette fois-ci... »

Solette ne trouva rien d'autre à répliquer qu'une mâchoire bien serrée.

Ce n’était pas une première pour Bisébia d’entrer dans un cimetière par effraction, ce ne serait pas une dernière non plus. Foutre la merde était probablement son sport préféré avec faire la fête en première place. L’enfer n’était pas fait pour elle, torturer les gens pour torturer les gens, ça pouvait être drôle un moment soyons honnête, mais ça devenait vite redondant. La Terre c’était plus marrant, il y avait une part de défi, de séduction, oui elle pouvait aussi faire la fête dans son harem privé en enfer, mais ils étaient tous terrifiés par elle et n’était plus marrant du coup. Le pas léger elle avança, elle entendit de bien vilains mots, mais elle ne savait toujours pas exactement d’où ça venait. Elle tenta donc un bonsoir. La voix se fait de nouveau entendre, Bisébia voit enfin la personne à qui appartient ses jérémiades. Un sourire malicieux égaie son visage faussement angélique.

- Coucou sweetie ! La très jolie cinglée s’appelle Bisébia, trop d’alcool dans le sang, elle ne pense pas à donner le nom de son hôte, son regard curieux détaille la scène elle remarque les traces de magie vaudou et le serpent, sans doute un familier. Waaaawwww, je peux t’aider ? Tu veux maudire qui ? Les malédictions sont ma spécialité ! Bisébia est soudainement de bonne humeur, enfin une occupation un peu sympa, soudain son regard se trouble, elle semble perdue. Par Dionysos ou est ma bouteille ? s’agite-t-elle soudainement, oubliant un court instant la raison de sa venue dans un cimetière. La démone tenta de remonter le fil de sa soirée. La dernière fois qu’elle l’avait en main c’était avant de voler la trottinette, puis plus rien, elle a dû la laisser dans la rue et un clochard l’a probablement déjà prise. Bon sang, bordel de merde, j’ai plus d’alcool. Ça sent l’herbe, elle renifle l’atmosphère, ça et le cadavre évidement. Tu me passes de l’herbe ? Si t’es mignonne, je pourrais t’aider, je n’ai rien de mieux à faire !

Bisébia pousse les trucs qui encombre la tombe à côté de laquelle la jolie mulâtre creuse, elle s’allonge sur le flanc et pose sa tête dans sa main, elle fixe le serpent. Ses cheveux lui tombent devant les yeux et elle rigole, elle tente de les dégager en soufflant dessus, puis finalement elle le fait avec sa main de libre.

Bibésia...

Ce nom n'avait rien de singulier, et tout pour alerter une sorcière à l'hôte se dissimulant quelque chose à éviter. Ces «choses à éviter», pour Solette, brillaient souvent d'un éclat bien trop tentant. Si on lui avait proposé de se fricoter à Satan, Dieu sait si elle aurait hésité avant d'accepter. Alors, que la sorcière ne dut précisément de quelle nature était cet être à l'aura maline et au charisme absolument satanique, elle se sentait déjà plus à l'aise qu'une minute plus tôt. De mauvaise augure, probablement.

Bibésia s'approche de moi et de ma tombe. Je rallume mon joint de mon briquet et tire quelques touches. Je ne vois pas pourquoi elle voudrait de mon mal, ni pourquoi elle voudrait mettre un terme à mes plans. Je la reluque, du haut en bas, et sans subtilité. Et je fume, le menton bien haut. Une peau douce, des doigts délicats, un cou fin, des épaules étroite, une poitrine bien dessinée, des hanches voluptueuse, probablement de belles fesses...

Alors que Solette salivait en vieil oncle pervers sur la loque humaine de Bibésia, Basile remis peau en serre, comme pour s'éloigner de cette abjecte habitude. S'il avait put affiché un visage dégoûté, il aurait fait. S'il avait donné quelque chose de lui dire d'arrêté de fixer le corps d'une femme comme une pièce de viande, il l'aurait fait pour la centième fois. Peu flatteur, et peu respectueux, en son sens.

Je suis tirée de mon inspection soucieuse par sa question. Elle me demande qui je veux maudire avec l'enthousiasme d'une gamine de huit ans, et je n'ai plus aucune doute sur sa nature. Elle semble excitée comme un charme. Elle est très jolie, et probablement exécrable comme compagnie pour la plupart des gens. C'est ce que je juge, rapidement. En même temps, elle est bourrée. C'est difficile de se faire une tête sur un petit diable bourré.

Je n'ai pas le temps de répondre à sa question qu'elle se rend compte qu'elle a perdu sa bouteille d'alcool. C'est peut-être mieux ainsi, finalement. Puis, elle dit que ça sent l'herbe. En fait, je me demande si y'a pas un démon qui me troc de l'herbe contre de l'aide dans mon maléfice. C'est pas conseillé de troquer avec le Satan.

Alors, j'adhère au coup et je lui tend le joint. Je la jauge, silencieusement. J'aime l'issue de cette rencontre, à date. Au pire, je me serai rincer l'oeil. L'herbe que nous fumons est de mon invention. J'ai cueillis ces herbes moi-même, les ai séchées avec les rituels propices et j'ai fait les incantations qu'il fallait dessus. C'est une sensation qui diffère de la marijuana, mais qui lui est semblable. Inexplicable sensation avec laquelle pousse une addiction très forte. Moi, j'y suis accro depuis que je suis gosse. Évidemment, je n'ai pas besoin de lui dire tout ça : je la laisse vivre ses expériences comme une grande meuf.  

Je baisse mon bandeau, et dévoile ma bouche.

« Y'a le père du sénateur du Nevada qui vient de crever. Il a été enterré cet aprem'... À cause de... de traditions ou de formalités à la con, je sais pas trop, entre le sénateur de Los Angeles et lui, bah il s'est fait enterrer ici. »

Je reprends ma pelle et creuse mon trou.

« Je me suis dis que ça serait plaisant de se payer de leur gueule, à toute leur famille. Ça peu être n'importe quel scandale ou n'importe quelle connerie alors qu'ils sont en direct à la télé nationale... Je sais pas, j'ai pas trop réfléchit encore. »

Sa pelle butta sur du dur qui résonna comme un cercueil. Elle le dévoila en tassant lourdement les mottes de terre fraîche de son outil. Puis, elle remis son masque et l'ouvrit. Le parfum mélodieux s'apparentait davantage au chloroforme qu'au cadavre, à ce stade.

« Ouais, c'est lui. D'habitude, je range le cercueil, mais là je vais tout laisser les traces de mon vol. T'en dis quoi? Ça va les faire gerber juste parce que c'est un «homme important». »

Elle ricana. Solette amenait toujours ses cadavres à son logement par chaloupe. Les policiers et leurs chiens pisteurs ne pouvaient tracer de déplacement dans l'eau. C'était parfaitement subtile quasiment à tout coup. Comme ses ancêtres l'avaient fait pour fuir les plantations sans que les chiens ne les sentent. Il n'y avait rien de plus puissant que de ramener ses héritages survivants dans ses cultes quotidiens.

Besie était trop dans les vapeurs de l’alcool pour remarquer le regard lubrique de Solette et même si elle l’aurait remarqué elle aurait sans doute apprécié. Solette ne semble pas trop vilaine, enfin difficile à dire avec le bandana sur la bouche et en plus tous le monde sait que l’alcool ne rend pas particulièrement difficile. En plus quoi de plus charmant qu’une baise sauvage dans un cimetière sous une lune pleine, non franchement je ne vois pas. Sauf que pour le moment Bisébia n’était pas très réceptive à cause de tout l’éthanol dans son sang. Besie pour le moment veut s’amuser, elle est comme allergique à l’ennui. La mulâtre lui tend son joint et les doigts fin de la naine qu’elle possède l’attrapa avec avidité. Bisébia s’allonge sur le dos et tire une taffe, avec son talent habituel elle forme de rond tout en écoutant l’intrigante inconnue. Sa tête glisse sur le côté pour observer la fille qui a retiré son bandana, en effet elle est jolie. Elle explique son plan, ça a l’air sympa, elle a l’air d’être une fouteuse de trouble comme elle.

- Tu veux les faire chanter ? Je me débrouille pas mal en chantage aussi.

Bisébia est un véritable parasite alors tout ce qui lui permet de s’incruster comme le mensonge, le chantage, l’escroquerie, la manipulation, elle ne s’en sort pas trop mal, mieux que la plupart des démons en fait. Au temps de sa gloire quand elle pouvait signer des contrats, elle était un des soldats de Satan les plus efficaces, parce qu’elle était moins nombriliste que les autres et qu’elle savait écouter au besoin. Ça n’a pas trop changé en fait, elle est toujours très maline, elle est juste paresseuse et n’a pas vraiment d’ambition. Carpe diem. La brune creuse, elle pourrait l’aider, mais elle n’y pense pas et fume le joint offert tout en buvant les paroles de sa rencontre nocturne. Soudain un bruit presque familier, le cercueil a été atteint. Bisébia vient juste de terminer son joint, ça tombe bien, elle le balance, vu le peu de verdure présente il ne va pas enflammer l’endroit. Elle se redresse, rampe à genoux et se penche tête en avant vers le trou, ses cheveux retombent dans sa figure, elle bougonne des paroles en grec ancien incompréhensible. Elle se redresse et remet sa tignasse en place.

- Laisse le bordel, ça va être marrant. Promesse de fauteuse de trouble. Tu as entendu parler des policiers frappant des festivaliers durant un début d’orgie dans le désert californien il y’a trois jours ? C’était moi et mon pote Asmodée. Bisébia a un grand sourire fier d’elle, elle fixe le cadavre le jaugeant, un trop vieux pour elle quand ils sont vivants ils ont l’expérience, mais là mort ça ne sert à rien. Pauvres et riche, la mort les rend égaux. C’est vite dit, regarde le travail du maquilleur, les cadavres n’ont pas la même gueule dans les quartiers pauvre de Calcutta. Je peux t’aider, il est tellement maigre que je pourrais le porter avec deux doigts.

Solette haussa un sourcil. À dire vrai, jamais elle n'avait pensé faire chanter un politicien. Les humilier publiquement avait toujours été sa tasse de thé confortable. Et, sans trop y avoir réfléchi, elle ignorait ce que «des imbéciles à la tête de zoos» pourraient bien lui procurer. Pour une démone éclatée, il y avait tout à gagner, naturellement.

J'ai pas trop besoin de me questionner une deuxième fois pour adhérer à son idée. J'ai ce pressentiment que cette histoire pourrait déraper plus loin qu'elle ne s'entend de l'être. Ça se voit bien qu'elle s'est invitée dans mon jeu et que je la laisse faire. En fait, je vois que je pourrais en tirer autant qu'elle. D'une part, je m'associe à un épluche du Satan, et d'une autre je ramène son corps canon à la maison. Quand elle me propose de de laisser le bordel pour activer une bande de guenons médiatisés demain matin, je sais que j'ai trouvé l'âme-soeur.

Je la regarde, Bibésia à genou à côté de moi qui fixe le cadavre. Elle me raconte les folies d'adolescente pure de mal qu'elle a fait la semaine dernière. Si j'en avais entendu parlé? Je lui souris sous mon bandeau. C'est le nouveau fantasme de la plupart de mes copains punks qui gravitent autour de moi. Certains regrettaient de n'avoir été présent, certains espéraient que l'événement se produise sous la mutation d'un Woodstock nouvelle génération, et les craqués essayaient de monter quelque chose de semblable. La plupart sont pas foutu de terminer à se décrotter le nez, alors je me doute bien que c'est le genre de plan qui n'aboutira jamais si on a pas le coeur du Satan sur la paume.

Asmodée... Asmodée retient mon oreille, par contre. Je n'ai jamais entendu ce nom. Ou peut-être que si? Mais j'ai un vif noeud qui se fait dans mon hippocampe, et je crois que je devrais me souvenir de ce nom mais je ne fais que mâchouiller des souvenirs qui sont peut-être, en fin de compte, des rêves. Dur à dire.

Je me redresse, pelle à l'épaule, en écoutant son poème de vipère qui a toute sa tête.

« Égaux? De la merde. Mon cadavre sera toujours plus respectable que celui de n'importe quel démocrate qui laisse pourrir sa famille dans la vomissure de ses scandales inhumains. »

D'un ton agressif, comme si on venait de lui voler son sucre d'orge. Solette était bien évidemment au dessus de n'importe quel damné, n'importe quel cadavre et n'importe quel perdition. Peu importe ce qu'elle avait fait ou qu'elle ferait, à partir de la naissance de ses convictions elle était déjà supérieure à n'importe quel libre penseur de l'aile droite qui voudrait bien avoir son opinion personnelle. Les opinions personnelles ne passaient pas toujours, avec l'arrogante Solette, vous comprendrez. Il suffisait d'aimer vivre dans le confort pour perdre quelque chose comme toute sa gratitude éternelle.

Je pointe l'Ouest du cimetière, où, juste derrière la barrière, se trouve notre véhicule.

« J'ai une voiture volée, là-bas. Je te laisse l'amener si ça peut te faire plaisir. »

Solette cachait aisément qu'elle serait immensément heureuse de ne pas avoir à forcer sur un probablement plus lourd qu'elle comme elle ruminait une bonne vingtaine de minutes à le faire normalement. Elle ne se venterait pas non plus de porter autant de muscles qu'un cure-pipe.

Avant de partir, elle me donne quand même l'idée que je n'ai jamais osé à profaner davantage une tombe qui n'a rien demandée. Je sors ma canette de peinture en spray mauve et la secoue dans un bruit de bille réconfortant. J'engendre le cadavre, en prenant la peine de ne pas me péter la gueule dans la terre avec mes plateforme bourrées de spikes. Sur sa tombe, je prends la peine de beurrer des mots laids mais lisibles :  

« Swine genitalia »

Juste par-dessus son nom. Puis, je lance la canette à Bibésia.

« Je t'attends dans la voiture... Je vais rouler un autre pet. »

Et elle s'exécuta de ce fait, tournant les talons à la démone, pelle à l'épaule. Basile la suivait en léchant l'herbe de son corps, doucement. Solette était certaine qu'elle la suivrait, cadavre en main. Oui, elle avait confiance en Bibésia. Stupidement, vous croyez? Enfin, elle était certaine qu'elle reviendrait pour de la drogue gratuite. C'était presque une garantie elle même ayant une garantie. Enfin, une fois loin des odeurs, elle retira son bandanas et respira un énorme coup.

Je me retrouve avec une fille du Satan, à scandaliser les politiciens... Ouain... J'ai pas assez fumé pour ça, moi.

- Pour moi c’est juste un macchabée, soupira une Bibesia qui n’en avait clairement rien à battre de la politique.

Même si elle était née à l’époque de la démocratie cela ne l’avait jamais intéressé. Les lois des hommes cela lui faisait une belle paire de jambe. Bibesia montait des enfers et la terre était son terrain de jeu, c’était en enfer qu’elle était être ceci, être cela, faire ceci, faire cela. Sur terre la fête était éternelle pour elle. Elle avait totalement le cul bordé de nouille, une vraie princesse, mais sans les pépettes. Mais en avait-elle besoin ce qu’elle voulait, elle le prenait par le charme ou par la force.  Bisébia fixait le cadavre, son esprit s’aventura un instant, ses yeux se plissèrent de concentration tentant de découvrir ce à quoi il avait pu ressembler plus jeune avec du sang chaud dans les veines. Parfois l’alcool et la drogue, ça rendait un peu philosophe. Solette la sort de ses réflexions, alors qu’elle se demande sa couleur de cheveux, la vieillesse les a rendus gris.

- Ok capitaine !

La métisse dont elle ignore encore le nom, prend une bombe pour taguer un truc sur la tombe, elle lit et glousse un peu. Elle a l’alcool joyeux et encore heureux, elle la déesse de l’ivresse et sa démone aussi.  Solette lui balance la bombe et elle la rattrape avec une adresse assez remarquable pour une personne aussi défoncé qu’elle. Elle réfléchit un peu à ce qu’elle pourrait écrire. Elle n’est pas très inspirée il faut l’avouer, elle ne le connait même pas ! Dure d’écrire une épitaphe digne de ce nom. Elle se penche pour écrire finalement un : By Besie. Le tout accompagné d’un petit cœur très réussi, une fausse piste gratos pour son amie de la soirée, à moins que son surnom soit aussi Besie, ce qui qui est assez peu probable quand même. Elle tend ensuite son bras gringalet, attrapa le col du cadavre bien vêtu et elle le tire comme s’il pesait aussi lourd qu’un paquet de chips hors du cercueil. Elle traine ensuite le cadavre vers la voiture de Solette comme un petit chiot apprivoisé, son père et sa tante serait vraiment furieux de la voir en train d’obéir à une mortelle, mais défoncée elle ne réfléchit pas trop et puis elle n’est pas aussi prétentieuse qu’eux. Elle a côtoyé plus d’humain et vécu plus longtemps auprès d’eux que presque tous les démons. Mais encore son statut de fille d’ange déchu et potentielle petite fille du grand prince des enfers, fait qu’on ne lui dit rien devant du moins. Elle rattrape vite Solette qui est en train d’ouvrir le coffre de sa voiture

- Tu t’appelles comment en faite ? Je peux t’appeler hé toi la mu… métisse à la crête, mais c’est un peu long. C’est quoi la prochaine étape ?

Bibésia a failli dire mulâtre, mais elle s’est ravisée, elle n’est pas raciste, elle supporte tous les humains avec autant de patience chacun, c’est juste que c’est une vieille malgré les apparences et son langage en garde parfois certaine étrange trace. Besie s’approche du coffre et soulève le corps dans ses deux bras pour l’installer en position fœtale. Elle referme le coffre aussi doucement que possible.

Bibésia rattrapa Solette en un rien de temps. L’opération dut naturelle : la sorcière ouvrit le coffre de sa voiture alors que la démone traînait le cadavre comme s’il eut été un tas de cure-dents. Et Solette s’aperçoit, bien petite, qu’elle n’aurait rien à offrir comme défense nécessaire contre une telle créature des Enfers. La naïve orgueilleuse qu’elle est ne peut démontrer les doutes quant à l’acquisition sans réflexion de l’amitié conquise avec un démon. De toute façon, n’était-il pas trop tard et trop potentiellement profitable, comme elle l’avait cru de prime abord?

Quand elle me demande mon nom, ma face maintenant à découvert lui renvoie un air très peu impressionné. Elle allait m’appeler la mulâtre, ou je me trompe?! Bien sûre, il n’y a rien comme l’insouciance absolue des origines ethniques pour un fils du Satan qui vient des flammes les plus vives de l’Enfer. Elle a que faire du racisme, c’est une évidence. Pour elle les terriens n’ont pas plus d’origines culturelles que les mouches à merde, sans doute.

Alors, pourquoi ne suis-je pas fraîche à lui donner mon nom? Mon prénom, d’abord, je peux lui prêter. Mais il est hors de question qu’il lui appartienne. Je lui rétorque, avec une pointe de hargne et une bonne beurrée de sarcasme.

« Tu peux m’appeler Solette. Ou Sol’ si c’est trop long pour toi, l’asiat’. »

Je lui fais un clin-d’oeil, et je lui lance les clefs de la voiture. Est-ce que je suis imprudente, en ce moment, avec un démon à peine connu? J’aimerais me raviser. Elle est la démone la plus charmante et adorable qu’il se doit. Je vois Basile se mettre à ses aises en montant par la fenêtre se tapir sur la banquette arrière.

« T’as trop bu pour rouler des joints, mais t’es juste assez bourrée pour conduire. T’as pas envie de t’essayer? »

Solette pris place au banc passager. Il n’y avait qu’un temps de fête sans soucis, avec Bibésia, apparemment. C’était un plan, pour le moindre, probant à tomber à l’eau à tout moment. Mais la sorcière fonceuse n’avait qu’une chose en tête : jouer l’immature assez loin pour en devenir la reine de quelque chose.

HRP : Désolée de cette sacré longue absence, j’ai eu un coup de mou c’est assez rare niveau rp, mais I’m back

Besie était de nouveau pimpante, elle avait trouvé de quoi occuper sa soirée de façon assez fun. Les choses qui choquaient les humains n’étaient pas grande chose pour elle alors ça la faisait toujours bien se marrer de les voir s’offusquer pour si peu. Un mort, c’est un mort, il ne va pas se plaindre, son âme n’est même plus là, juste des résidus infimes.

- Sol, c’est noté sunshine, petit jeu de mot entre langue. Do, mi, ré…. Non do, ré, ré mi, fa sooool, la, si, doooo.

Non Besie ne volait pas très haut actuellement, ses jeux de mots étaient équivalent à ceux d’une gamine de 8 ans, mais ses propos n’étaient pas méchants. Elle appréciait Solette pour le moment, mais elle était un petit démon parfois facétieux il ne fallait pas l’oublier.

- Je ne suis pas asiat ! remarqua-t-elle soudainement les yeux grands ouverts. Je suis grecque ! Enfin… En partie.

Elle était née en enfer dans un palais de Samael, démone était sa race, mais aussi sa nation. Sol était inconsciente, Besie ne risquait rien à conduire à part peut-être perdre ce corps un peu plus tôt que prévu, mais la métisse risquait beaucoup plus. Besie cependant ne pensait pas naturellement aux autres à long terme, alors elle prit les clés se contentant d’obéir n’ayant pas assez d’esprit pour songer aux conséquences de ces actes. Elle voulait juste faire plaisir à Solette pour le moment, il n’y avait aucune garantie que ça dure, mais pour le moment le peu de concentration qu’elle avait était focus sur cet objectif. Elle mit les clés dans le contact.

- Pourquoi pas ! T’as une adresse ? T’inquiètes pas si on nous arrête je ferais en sorte qu’on n’est pas d’amende !

Se fier à un démon bourré, très bonne idée Solette. La soirée avait totalement la chance de terminer en un carnage.

HRP : no problemo, j’étais en absence je l’ai pas senti XD


Il n’y avait rien de mieux pour la démone, afin de monter la l’estime de Solette, que de lui fabriquer quelques mots de français. Une langue tellement proche de celle avait laquelle elle avait naquit… Tout aussi sexy que charmant de sa part, elle pensa de son fort intérieur qu’il fallait parfois taire brutalement.

Naturellement, qu’elle n’est pas asiat’. Elle n’est pas humaine. Ni terrienne, d’ailleurs. Quand même ironique de lui faire la passe : comme si ça importait pour un être du Satan la couleur de la peau de l’un comme de l’autre. Sont évolués, ces êtres du Satan. C’est fou comment les apparences peuvent nous malmener de partout. Mais t’as pas envie de la voir sous son vrai minois pour te le remettre en pleine face qu’elle n’est pas asiat’. Ça, non!!

À côté d’elle, dans la voiture, Bisébia n’était aucunement en état de conduire, si seulement elle savait conduire. Solette la droguée n’en avait guerre et se croyait bien plus forte que quiconque. Exactement comme un adolescent qui boit et prend le volant sans imaginer un instant que les conséquences négatives pouvaient frôler le cours de son existence.

Enfin, quand au bout de la ligne, quand y’a de la cam et des chances de se taper la plus sexy nana inhumaine que j’aurais jamais la chance de côtoyer de toute ma vie…

En fait, l’excuse immanquable de Solette était ses sacrifices et rituels bénéfiques qu’elle produisaient sur elle-même régulièrement. Elle plaidoyer aux lwas de toutes sortes de la chance, de santé, de veine improbable… Pouvait-on nommer cet art vaudou comme de la magie blanche si elle était égoïstement utilisée par une sorcière noire à des fins personnels destructeurs? Et surtout, pouvait-on en garantir sa vie saine et sauf? Non. Dans certains cas, « avoir de la chance » ne valait pas plus qu’un investissent de centimes à la banque.

« Tu sais la vieille usine de papier de toilette désaffectée sur le bord de l’eau vers l’ouest? Bah on va dire que c’est mon adresse. Tout droit, si tu connais pas, et à gauche à la lumière. »

Et sans aucune arrière pensée, elle alluma son pétard et baissa la fenêtre pour sentir l’air frais sur son visage. Mais quelle belle soirée sans aucun danger probant s’annonçait-il! Basile, lui, veillait avec crainte mais dans le plus total des silence observateur à la scène entière.

Je sais pas comment elle conduit, surtout affectée comme elle est… ça serait marrant de cabosser la ferraille un brin.

« Allez, si on se fait arrêter, on va juste avoir un cadavre de plus. »

Solette pouffa de rire en grimaçant, et donna quelques coups de coude à Bisébia pour l’inciter à rêvasser de pareille. C’était amusant, selon elle, de faire des conneries avec un démon.