« Voilà ! Tout est réglé. Il me faudra juste une signature ici. Monsieur Fitzgerald ? Monsieur ? Vous êtes avec moi ? » Non, je n'étais déjà plus avec ce type dont le nom m'échappait. Il faisait partie des meilleurs agents immobiliers du coin, selon les dires de certains membres du coven. Je me fichais bien de sa réputation pour ainsi dire, la seule chose qui m'importait était de régler tout ça au plus vite. Je n'étais pas revenu ici, depuis la mort de mon ex-femme. Ezé avait fait du bon travail comme toujours et l'agent immobilier pouvait dès lors se targuait de vendre un bien en parfait état malgré ce qui c'était passé à l'intérieur. « - Oui pardon, vous disiez ?! » J'étais conscient d'avoir mauvaise mine et de paraître négligé sans mon costume, à cela s'ajoutait la barbe de trois jours, qui avait depuis longtemps dépassé ce délai de non-entretien. Mais pour dire vrai, je me fichais bien de l'apparence que je renvoyais, ma seule priorité étant de signer les papiers qui permettraient à ce type de vendre au plus vite cette demeure dans laquelle je ne voulais plus jamais remettre les pieds. « Oui, il vous reste à signer ici et ici » Avenant, le jeune homme qui ne devait pas être plus âgé que Zephyr – d'ailleurs, il faudrait que je trouve le temps de le voir au risque de vraiment passer pour l'enfoiré que je ne suis pas – me tendit le contrat sur lequel je devais apposer mes initiales et ma signature, ce que je fis sans traîner « - Voilà ! C'est à vous de jouer maintenant ! » Les dés étaient jetés et je me fichais bien du résultat. En quittant la demeure de mon ex, j'aurais dû me sentir débarrassé, il n'en était rien. Je continuais encore et toujours à me sentir coupable. La vision de son corps froid baigné dans une sombre marre de sang, sa lettre sous forme de dernières volontés... Ces infâmes visions ne me quittaient plus, et même lorsque le sommeil me gagnait, je ne pouvais me résoudre à m'y enfoncer trop profondément de peur de revivre ce cauchemar sans fin. Alors, pour y remédier – parce qu'on ne peut vivre sans dormir – je me livre depuis peu à quelques rituels dont je ne suis pas fier. Ça a commencé avec de petites décoctions, rien de bien méchant. Mais les effets n'étant pas au rendez-vous, je me suis tourné vers des méthodes un peu moins orthodoxes. Les décoctions sont alors devenues des potions de plus en plus fortes et de moins en moins légales dans le processus. D'ailleurs, au vu de l'heure, je devrais me dépêcher d'extirper la petite fiole qui se trouvait dans le fond de ma poche et en boire le contenu pour que durant 24 heures, sans interruptions aucune, mes plus noires pensées soient chassées et que je me complaise à croire que tout allait bien dans le meilleur des mondes.
Karl avait bataillé pour trouver le bon dosage et les ingrédients de cette potion d'amnésie temporaire, des ingrédients que l'on ne pouvait trouver que dans une seule boutique de Black Stone Street, à l'abri des regards. Karl n'était pas fier d'ainsi contourner les règles, mais il ne pouvait se résoudre au vu de son rang, à laisser ses émotions le contrôler. Et puis, il y avait Nathan quelle bien piètre image, il lui renverrait s'il continuait à se lamenter de la sorte ? C'est donc le cœur léger et la tête vidée de ses maux qui le tourmentaient, que le régent retrouva ses quartiers. Nathan venait de rentrer de White Chapel où il y passait de plus en plus de temps et ne chercha pas à entamer la conversation avec son père. Pour ainsi dire, voilà des jours qu'il restait muet à proximité de Karl, une attitude qui l'aurait sans doute blessé sans la potion qu'il s'était enfilé en amont. « - Nate ! Écoute ! Je sais que tu souffres... » L'ado l'arrêta aussitôt, faisant ainsi entendre sa voix pour la première fois depuis longtemps. Il n'avait très clairement pas envie d'avoir cette conversation encore moins avec un père absent et déserteur comme il se plut à le faire entendre. Des paroles qui ne semblèrent toucher l'intéressé qui se contenta de hocher la tête, provoquant la colère de son adolescent qui s'en alla retrouver ses appartements en claquant la porte.
Être père, cela ne s'apprend pas, c'est inné et très clairement Karl Fitzgerald ne se sentait pourvu d'aucune fibre paternelle à ce moment très précis. Mais il devait aller de l'avant et devait, au vu de ce que Nathan venait d'endurer avec la mort de sa mère, faire des efforts et quoi de mieux qu'un beau cadeau de Noël ? Oui, pour sa défense, Fitz était maladroit et peinait à voir Nathan comme un adolescent. À ses yeux, il demeurait un enfant et pour faire plaisir à un enfant, c'est connu l'on dispose toute une flopée de cadeaux sous le sapin quand les cloches de Noël retentissent. C'est logique ! Cependant, dans sa chambre, Nate bouillonnait se demandant ce qui prenait à son père d'agir de la sorte. Il aurait dû le blesser, le faire sortir de sa réserve. Oui, le jeune garçon était dévasté et attendait plus de réactions de son père, qui pour l'heure, dénué de ses maux, semblait pourvu de la sensibilité d'un robot. « - Je reviens Nate ! » laissa-t-il entendre avec légèreté en enfilant sa veste. Dubitatif, l'adolescent quitta son lit et sorti de sa chambre demandant à l'homme qui lui faisait face, où il comptait aller. « - Au centre commercial, acheter quelques cadeaux. C'est bientôt noël » Cette réponse lui parut tellement logique qu'il s'offusqua presque du manque de réaction de son fils. « - Tu veux venir ? Cela nous permettrait de passer du temps ensemble et d'apprendre à mieux se connaître. » « Mais c'est quoi l'intérêt ? Si tu veux m'offrir un cadeau, c'est mieux que je ne sache pas. » « - Oui, c'est vrai ! Mais je préfère être orienté, plutôt que de prendre n'importe quoi et te décevoir, une fois encore » Nathan serra la mâchoire, Fitz semblait l'avoir touché, mais par fierté et au non de la rancœur qu'il éprouvait encore contre le régent de Red-House, l'adolescent et ne laissa rien paraître et se contenta d'acquiescer, acceptant quand même t'accompagner son père au centre commercial.
Les deux Fitzgerald quittèrent donc le quartier général de Red-House afin de regagner la voiture de Karl, qui une fois encore, se priva du chauffeur qui lui était alloué à la grande surprise de l'adolescent. « Madame Johnston a toujours son chauffeur ! » « - Oui, sauf que je ne suis pas Madame Johnston mon grand » Une conversation qu'il ne voulait pas développer, pas avec Nathan en de telles circonstances. Par chance, le trajet ne fut pas si long et en moins de deux, ils se retrouvèrent face à l'entrée du centre commercial décoré par une nuée de guirlandes et laissant entendre même à l'extérieur, quelques chants de Noël. À l'intérieur, c'était la grande influence et il n'était pas aisé de rejoindre le grand escalator pour descendre d'un étage. « - Qu'est-ce que tu veux faire ? » Karl était bien décidé à faire plaisir à son fils et accessoirement lui trouver le cadeau idéal. « J'sais pas » telle fut la seule réponse du gamin avant qu'il ne se décide à rejoindre un magasin présenté comme le « temple des geek » Karl qui s'apprêtait à suivre, remarqua non loin de là, une tête familière « - Je te retrouve à l'intérieur » fit-il entendre à Nathan qui avait déjà mis de la distance entre eux tandis que le sorcier s'approchait d'un stand de tacos « - Keon ! Keon Quill ? »
Un tacos ! Non, plutôt trois. Oui, trois délicieux tacos ça lui semble vital, parfaitement indispensable pour faire passer sa dépense précédente. Il a besoin de remplir son estomac, après tout, il n'est plus à quelques dollars près. Il n'en revient pas lui même de la somme qu'il avait remis au commerçant, il n'en revient pas d'avoir su en mettre autant de côté ! Il faut dire que décrocher un emploi à l'hôtel Lux a été une claire belle opportunité financière pour le médium. Et grâce à son dernier accord avec Lyanna, une vie de sobriété semble se profiler... Fini les dépenses dans les bars ou les magasins d'alcool. Cela n'est que promesse d'un avenir plus sain et d'un compte en banque davantage rempli pour offrir bien des choses à sa petite femme adorée et son chien adorable ! Il ne pense pas que la vie sera plus simple, son couple a traversé une longue période douloureuse, ils méritent de repartir sur de meilleures bases. Plus solides que jamais, il a prouvé qu'il pouvait lui aussi la supporter, certes à long terme cela aurait fini par le tuer entre les idées noires, son alcoolisme silencieux et son anorexie. Il veut être optimiste, il a envie de sourire de nouveau à la vie.
Il a tenu autant que cela a été nécessaire mais il n'est pas certain qu'il aurait pu porter bien longtemps leur couple. Il sait qu'il n'aurait fait ça pour personne d'autre qu'elle. Dans d'autres circonstances il se serait laisser couler dans ses addictions, mais Keon se surprend un peu plus chaque jour d'être animé d'une profonde et sincère volonté de vivre grâce à Violet. Et finalement s'ils n'avaient pas eu à traverser ces dernières épreuves, il ne l'aurait peut être jamais découvert.
Quoi qu'il en soit, il se retrouve bel et bien devant ce stand de tacos pour se réconforter suite à son achat. Il est fier de sa dépense, mais il ne peut s'empêcher de se sentir tout à fait nerveux ! Bien que convaincu qu'il n'aurait jamais pu espéré trouver aussi beau pour mettre au doigt de sa femme et qui soit dans son budget ! C'est comme si cette bague l'avait appelé. Il ignore quand il comptera la lui offrir, il a bien l'intention d'attendre au moins quelques semaines de sobriété, le temps que son corps évacue finalement les résidus de ses dernières consommations. Qu'il soit parfait pour elle.
Il veut être un homme clean, un homme qui la mérite réellement. Le Canadien craint quelque peu qu'elle n'apprécie pas l'usage de magie sur lui, mais il en a assez d'être l'esclave de vices qu'on lui a implanté dans la cervelle dès l'enfant. Et depuis qu'il ne se rendait plus à ses réunions aux alcooliques anonymes suite à son altercation avec sa marraine peu avant que Violet ne découvre pour sa grossesse, il lui avait semblé que tout était sans espoir. En quête d'un miracle, il s'est naturellement tourné vers la magie en désespoir de cause.
Alors qu'il tend un billet de vingt au vendeur, une voix dans son dos l'interpelle. Les sourcils du médium se dressent de surprise en reconnaissant le séduisant régent de la Red House. Il a le curieux sentiment qu'à chaque fois qu'il rencontre Lyanna, peu après il tombe sur Karl ! Manquerait plus que ces deux là soient en fait ensemble, ah ah ah ! (Oui, il se trouve drôle parfois) C'est peut-être un peu tôt pour de telles conclusions, car il n'a rencontré la sorcière que deux fois.
Le trentenaire aux traits particulièrement expressifs ne pu se retenir de sourire, heureux de revoir monsieur muscles mais aussi parce que celui-ci ne l'avait pas oublié. Ce dernier fait ne peut que charmer son petit cœur en permanence en quête d'attention et du sentiment d'exister ! - Karltacos !
Et pile devant un stand vendant ce délicieux met ! Les coïncidences font quelque peu sourire le médium bien qu'il sache que ça ne peut être d'affaires de coïncidences, cela semble presque tout de même semblable au destin.
Keon se détourne malgré tout pour attraper sa commande avec une pointe d'excitation, sans omettre de récupérer sa précieuse monnaie. Il remercie chaudement le vendeur avant de reporter toute son attention sur le sorcier.
- Je pensais pas que t'étais du genre à traîner dans ce genre d'endroit ! Mais qu'est-ce qu'ils ont de plus qu'ici les boutiques de luxe ? Ils vendent même pas de tacos je suis certain !
Il plonge sa main dans son sac, il a beau ne posséder que peu de choses, Keon est du genre à se montrer généreux. Et puis Karl a été plus que bon avec lui, Keon doit bien le reconnaître. Il lui tend un de ces délicieux sandwichs mexicain.
- T'as cinq minutes, pour ton pote Ferdinou ?
Il lui sourit franchement, levant les yeux au ciel, conscient de sa propre absurdité de l'autre soir. Il baisse le volume de sa voix, même si ça lui donne l'allure d'un revendeur de drogue ou plutôt de tacos étant donné les circonstances. Il n'a pas fière allure sous son sweat shirt usé à capuche, son corps maigre peine à reprendre du poids malgré toute sa bonne volonté en la matière. Ses joues sont cependant moins creusées et ses doigts moins squelettiques. S'empiffrer n'est pas la solution, il doit manger régulièrement en quantité suffisante et surtout des protéines. C'est long et fastidieux.
C'était difficile de savourer l'instant, car privé de certaines sensations, et des sentiments même les plus triviaux. La potion faisait effet, c'était indéniable, mais le régent semblait aussi incapable de s'émouvoir de l'attitude de Nathan, qui aurait peut-être préféré voir son père réagir davantage plutôt que de ne pas s'émouvoir d'être presque insulté. Au lieu de ça, le sorcier arborait un léger sourire, presque robotique, faisant montre d'un détachement presque blessant pour un adolescent en deuil. Les deux sorciers avaient donc quitté le Red-House pour regagner le centre-commercial. Si la démarche de Fitz était louable, sa maladresse mettait à mal tous ses efforts. Il était présent, mais peinait à enrichir la conversation. Que pouvait-il lui dire sans prendre le risque d'offusquer l'adolescent ? Que devait-il lui acheter pour lui faire plaisir ? Nathan, en avait-il au moins quelque chose à faire ? Non, de toute évidence, « le temple des geeks » avait toutes ses faveurs et sans se faire prier le jeune garçon s'éloigna pour pénétrer le magasin tandis que le regard de Karl se braquait vers un horizon lui moins incertain. Face à lui, se dressait un stand pourvu de quelques couleurs criardes et d'un ridicule sombrero. Le O Tacos n'avait rien de bien exaltant et l'on aurait aisément pu s'en détourner. Sauf quand on s'appelle Karl et que l'on aperçoit au loin un visage familier qui vous rappelle que même dans le tumulte du shopping, il existe toujours des alliés. Et celui-là avait vraisemblablement choisi d'enrichir le gérant de l'échoppe. Keon, Kéké, le « tacophile » les qualificatifs ne manquaient pas pour évoquer le jeune homme concentrait dans son action. Mais avant de le rejoindre, Fitz chercha Nathan du regard, il semblait ébahi par le rayon qui lui faisait face, des bandes dessinées de toute évidence. Se sentant observé, le jeune garçon reprit sa route ignorant au passage le signe de la main de son géniteur, qui ne s'offusqua point de ce manque d'attention. Au moins, désormais, il pouvait aller à la rencontre de Keon. Cela faisait plusieurs semaines qu'ils ne s'étaient pas revus et Karl brûlait de curiosité quant à l'avancée des projets du jeune médium. Il était loin de se douter, que cette rencontre bien qu'anodine, bouleverserait son monde et bon nombre de ses convictions.
Le surnom retentit et trouva un doux écho aux oreilles de Karl, qui constata que les effets secondaires de sa potion étaient temporaires et qu'il pouvait encore se réjouir de saluer un ami, ou du moins une personne qu'il appréciait. « - Cela sonne tellement bien que je me demande s'il ne serait pas intéressant d'en faire une marque » lança-t-il en s'approchant du jeune homme qui avait su le toucher par sa maladresse. Un sourire qui redoubla en intensité lorsque le régent posa son regard sur le « tacophile » Il avait bonne mine – tout est relatif – sauf pour ce qui est du côté vestimentaire avec ce sweat usé jusqu'à la corde. Son teint était un peu moins cireux et ses joues moins creusées. Certes, il y avait encore du progrès pour arriver à un résultat plus acceptable, mais Karl ne doutait point de la bonne volonté du jeune homme qui avait fait preuve d'une totale abnégation à l'égard de son épouse et semblait de ce fait, prêt à tout pour le bonheur de la jeune femme. « - Tu as cédé à la fièvre acheteuse à ce que je vois. » Il désigna l'autre sac qu'il avait en sa possession. « - Quant à ma présence ici, elle est motivée par l'envie de faire plaisir à mon fils ou du moins essayer. » Qu'il chercha à nouveau du regard « - Et laisse-moi te dire que s'ils se mettaient à vendre des tacos dans les zones chicos, ils les agrémenteraient de truffe ou de caviar, ce qui je pense, serait la pire idée du siècle. Mais à ce que je vois, tu es parvenu à trouver ton bonheur. » L'échange aurait pu s'arrêter là, si le régent n'avait pas acquiescé suite à la demande de Mr Quill. « - J'aurais toujours cinq minutes pour le type qui m'a fait découvrir les tacos. Et puis contrairement aux apparences, je n'ai pas un emploi du temps de ministre. Je suis juste à la recherche du cadeau parfait pour un adolescent. Tu pourrais peut-être aider d'ailleurs. » Mais avant le régent était convié à donner son avis « - Tu voudrais me montrer quelque chose ? Je dois m'inquiéter ? » Il le charriait évidemment, mais se sentit quand même obligé de le faire savoir. « - Je plaisante. Dis-moi tout. Qu'est-ce que je dois voir ? »
La marque KarlyTacos, cela semblait une somptueuse idée. Keon était déjà embarqué dans son imaginaire dans un paradis de tacos. Le jeune homme ne manque jamais une occasion de recréer le monde, et le monde parfait ne peut qu’être remplis de Tacos. Keon apprécie que leur conversation ne début par par ce traditionnel : comment vas-tu ? Parce que la réponse à cette question est devenu beaucoup moins évidente depuis leur dernière rencontre. Même s’il répondra forcément oui, mais ce sera avec le sentiment de mentir. Car jusque là, même si rien n’était jamais tout rose, Keon restait quelqu’un d’optimiste. Sans cette qualité, il n’aurait pas survécu. L’on peut être rêveur, mais la réalité noire finit toujours par nous rattraper et sans lumière dans sa tête, impossible de survivre dans ce monde bien cruel. Malgré son air crédule, Keon le sait fort bien.
- T’as un fils ? !
Qu’il s'écrit presque trop fort. Il n’avait pas vu de bague au doigt du régent et avait déduit que celui ci était un vieux célibataire, comme Lyanna. Ce qui était un double gâchis vu comme ces deux là sont terriblement séduisants, mais ça doit etre un truc de chef de coven ? Qu’est-ce qu’il en sait ? Mais il est assez heureux de savoir que Karl n’est pas aussi défaitiste au sujet de l’amour que cette pauvre Lyanna désabusée.
- J’espère qu’il te ressemble, monsieur muscles !
Lui dit-il avec un sourire amusé, cherchant lui aussi du regard un gamin sans savoir à quoi il pouvait bien avoir l’air et surtout quel âge ! Quand il vit passer un enfant de six ans édentés, il espéra que non… Non, tant mieux ! Sans quoi sa petite remarque d’avant aurait pu être assez vexante avec un engin pareil !
Son intérêt se porta sur le sorcier et son histoire de tacos à la truffe ou au caviar comme étant la pire idée qui soit. Keon eut beau réfléchir, il ne pu se prononcer.
- Jamais mangé de caviar ou de truffe… Mais c’est pas genre du nez de chien ?
Parfois c’est tellement difficile de croire qu’il a trente ans. Keon acquiesce, toujours là pour rendre service à ceux qui en ont besoin.
Ses sourcils s’envolent quand Karl lui demande s’il doit s'inquiéter, puis il sourit face à la plaisanterie. Toujours aussi naturel avec ses réactions. Keon se tasse pour qu’ils puissent se mettre un peu à l’écart, ne voulant pas être bousculé, avec la chance qu’il a, il serait bien capable de faire tomber son précieux achat ! Le Quill se mit à fouiller dans sa poche pour sortir l’écrin puis le tendit vers Karl, mais se stoppa avant de l’ouvrir.
- Ok, j’ai dis que t’avais de sacrés muscles, belle gueule tout ça, mais j’suis pas en train de te demander en mariage hein, c’est pour Violet !
Lui aussi pouvait bien plaisanter un petit peu, preuve qu’il allait mieux. Et toujours sans ouvrir la boîte, le bavard ajoute.
- Je sais on est déjà mariés, mais bon… J’lui ai offert une bague vraiment nulle, et j’voudrais faire mieux. C’est pas une bague neuve, mais c’est tellement mieux ! Et puis j’ai su tout de suite que je devais l'acheter, c’est comme si elle m'appelait !
Malheureusement, ce n’était pas que “comme si”. La bague avait réellement exercé sur lui une certaine attraction et le pauvre naïf et ignorant s’était rué sur l'occasion. Une bague magnifique bien qu’ancienne, parfaitement restaurée, brillante comme une neuve ! Keon n’avait pas pu payer la gravure pour inscrire leurs noms à l’intérieur de l’objet, mais en ont-ils vraiment besoin ? Ils pourront peut-être réaliser cela plus tard ? Il n’en sait rien, mais c’est un très beau bijoux, féminin mais discret, qui ira parfaitement au doigt de l’amour de sa vie.
A présent que les explications, il ouvre la boite - avec une grande habileté car sa seconde main est toujours occupée par un délicieux tacos - pour dévoiler à Karl son bel achat. Lui même a encore des étoiles en la regardant, il se dit que ça fera plaisir à la blonde. Pas qu’elle soit matérialiste, mais après la fête de Noël qu’elle lui avait offerte, il se disait que sa femme avait peut-être envie de plus de choses commes les autres et une vraie bague ça sera déjà un pas, mais surtout, il veut lui dire que malgré ce qu’ils ont traversé récemment, il l’aime toujours, et quand bien même elle se sent faible et coupable, il souhaite qu’elle sache qu’il l’aime quand même.
Il est vrai que toute bonne discussion débute toujours par un « salut ça va ? » Mais la relation entre Karl et Keon étant ce qu'elle est, l'on ne pouvait s'étonner de les voir introduire le propos en parlant tacos. Cela demeurait tellement absurde que l'on aurait pu croire qu'il était question d'un code entre eux et peut-être que ça l'était inconsciemment pour éviter les sujets difficiles – tous les deux avaient vraisemblablement vécus de rudes événements dont chacun ignorait l'existence – quitte à se focaliser sur de l'anecdotique. Le tacos était de ce fait, la meilleure des alternatives pour offrir une conversation sans avoir à s'élancer dans des sujets trop profonds. Le tacos expédié, il fallait quand même faire montre d'un peu plus de sérieux au moment d'évoquer le « pourquoi » du « comment » de sa présence ici, en plein milieu de ce « mall » ou galerie commerciale pour les non-initiés. « - Et ouais, j'ai un fils ! » laissa-t-il entendre presque comme si cela eu été une fatalité. « - Un fils à bonne distance » Il le chercha à nouveau du regard pour être sûr qu'il ne s'était pas fait la malle, comme il était en droit de le faire en de telles circonstances. Par chance, Nathan était à nouveau visible, bande dessinée en main, il venait de se poser dans l'un des fauteuils à disposition pour les aficionados de la lecture, patient de surcroît – parce qu'avec tous ces mouvements et cette pollution sonore inhérente aux commerces de cette ampleur – car il en fallait de la patience pour être capable de s'évader avec de telles contraintes. L'intervention de Keon, en plus de ré-attirer l'attention du régent sur lui, fit sourire ce dernier, qui si vraiment Nathan lui ressemblait, était à plaindre. « - Je ne le lui souhaite pas. » Il fit que le jeune médium se prêtait au jeu de la recherche en tentant de mettre un visage sur le fils de son interlocuteur. « - Non, il a toutes ses dents » lança-t-il en riant en posant son regard sur le gamin qui se trouvait dans le viseur de super Keke. « - C'est un ado, du genre renfrogné, mais bon je ne peux pas lui en vouloir, sa mère est morte » Il l'avait dit d'une traite, doublé d'une normalité effrayante dans la façon de présenter la chose, comme si quelque part, ça ne lui faisait rien. Et c'est vrai qu'il ne ressentait rien grâce à la potion qu'il avait précédemment ingurgitée et qui l'empêchait de souffrir et de laisser toute cette négativité inhérente à la culpabilité avoir raison de lui. « - J'ai sa garde depuis et je me suis dit que ça serait cool de l'amener ici » Un « cool » qui se traduisait par un fossé de plus en plus grand entre les deux Fitzgerald, mais qui aujourd'hui, n'offusquait point le père qui se raccrochait tout sourire aux branches.
« - Bienvenue au club alors. Et puis quand tu vois à quoi ressemble le caviar, tu n'as pas forcément envie de plonger la cuillère ou quoique ce soit dedans. Et pour ce qui est des truffes et pour ta gouverne, oui, c'est le nez du chien, mais c'est aussi un champignon très cher, pas trop dégueulasse que l'on trouve généralement à la carte de restaurants avec quelques étoiles. Ce n'est pas mauvais, mais tu ne rates pas ta vie, en passant à côté. » Et s'il était difficile de croire que Keon était un trentenaire « aguerris » quand était-il de Karl et de son rang ? En le voyant s'esclaffer de la sorte et faire preuve d'une si grande légèreté, il était difficile de s'imaginer que ce type « à la cool » était la tête, depuis plus de treize ans, d'un des coven les plus puissants de la côte californienne. « - Bon, je t'écoute, qu'est-ce que tu veux me montrer ? » Passé la vanne de la fausse appréhension et après s'être éloigné de la masse grouillante des gens en quête de bonnes affaires, le médium sortit de sa poche un écrin qu'il tendit à son interlocuteur qui éclata de rire face à la réaction de son jeune ami. « - Déjà, on se met à genoux pour une telle demande mon grand. Et loin de moi l'idée de t'offusquer, mais j'aurai décliné. Je ne suis pas un homme facile, tu sais ! » Mais l'écrin demeurait fermé et le bavard affable en explications. « - Bon arrête de meubler pour commencer. Montre-moi donc cette bague qui t'as appelé ! » Toujours le sourire aux lèvres, le régent faisait montre d'une impatience qui ne lui ressemblait pas, lui qui semblait d'un naturel si pondéré pour celles et ceux qui n'avaient pas la chance de bien le connaître. « - Alors ? » Le jeune homme ouvrit la petite boîte de sa main libre, Karl le sourire aux lèvres toujours – mais pas pour longtemps – laissa son regard se poser sur le bijou que l'on venait de présenter à sa vue. Une bague magnifique par sa simplicité, discrète et féminine en argent avec à la base de l'anneau, des entrelacs celtiques. Le sourire du régent s'éclipsa aussitôt. Le bijou était familier, trop pour que cela ne soit qu'une simple coïncidence. « - Où est-ce que tu l'as eu ? Qui te l'as vendu ? » Il chercha du regard un potentiel vendeur avant de reporter toute son attention sur la bague. « - Ma mère… » Il sentit son estomac se contractait et sa tête tournée – l'un des contre-coups de la potion venait de se manifester – tandis que ses jambes, par de petits tremblements, lui faisaient comprendre qu'il devait s'asseoir. « - Foutue potion ! » laissa-t-il entendre dans un faible murmure tout en sentant la nostalgie l'étreindre. Sa vision était elle aussi aux prises avec les contre-coups de la potion et avant qu'il ne s'en rende compte, le noir envahit son champ de vision et il se retrouva à terre, inconscient.
Il n’aurait jamais imaginé que cet homme soit père, même si tout à coup, cela paraît absolument logique. Il n’y a qu’à le regarder ! Le père parfait ! Enfin, il l’imagine, il n’a pas vraiment idée de ce qu’est un père puisqu’il n’en a jamais eu, pas même une ébauche, rien ! Mais il se dit qu’à côté de lui, malgré ses efforts auprès de Violet, il est forcément un bon père. Lui, il n’a pas été jugé assez bon pour qu’ils gardent leur enfant. Cette pensée il la chasse au loin, même si elle hante toujours quelque peu son cerveau. A jamais son fantôme personnel
Il sent ses joues s’enflammer lorsque Karl remarque qu’il était en train d'observer un pauvre enfant édenté, bien que soulagé qu’il ne s’agisse pas de lui. Non pas qu’il soit superficiel, mais quand même, quel complexe avec un père aussi beau. Keon sait apprécier la beauté quand il en voit, même s’il est fidèle à son épouse et qu’il n’a pas envie d’une relation extra conjugale depuis le jour où i a réalisé l’ampleur de ses sentiments à son égard, il n’est pas insensible aux charmes de chacun. Il faudrait être aveugle pour ne pas admettre que les régents des Covens de LA sont ce qu’il appellerait des “bombasses”. - Oh… Je suis désolé.
La mort d’une mère c’est triste.
Keon suivit le regard du sorcier pour trouver l’adolescent occupé avec sa bande dessinée. Au moins le kid à son père pour s’occuper de lui, c’est déjà un luxe que lui n’a pas pu avoir. C’est difficile de parler de chance dans ce genre de situation, pourtant, c’est bel et bien ce qu’il pense. C’est une chance remarquable. - Moi aussi j’ai perdu ma mère quand j’avais dix ans.
Il annonce cela avec calme, alors qu’il n’a jamais fait le deuil de cette relation pour la simple et bonne raison qu’elle n’est pas morte, du moins, pas quand il l’a quitté. Quand il a été trouvé complètement imbibé d’alcool, qu’on l’a emporté pour le mettre en sécurité loin de cette junkie. Il a essayé d’invoquer son âme, mais elle n’est jamais venue. Il a envie de croire qu’elle est quelque part… Toujours en vie.
- Oui c’est plutôt cool.
Son “cool” sonne tout aussi faux. Parce qu’il sait que l’on a que faire de quelques bandes dessinées quand votre mère vous manque. Changer de sujet semble être une bonne idée, d’abord les tacos, puis lui vient l’idée de changer le ton en lui parlant de la bague, bien que sa manière de lui présenter les choses, sonnait étrangement comme une demande. Voilà qui eut finalement le mérite de détendre l'atmosphère. - Décliner carrément, tu voudrais même pas y réfléchir un peu ?
Il pouffe de rire. Jamais Keon aurait pu songer au mariage un jour. Il est tombé amoureux tant de fois, c’est ce qui lui a causé beaucoup de malheurs au final. Mais avec Violet, c’est une évidence. Il lui a demandé d’être sa femme, pour qu’il soit à jamais son petit mari.
- Où je l’ai eu ? Bah dans la boutique là bas, t’sais à côté du… Hey, pourquoi tu tire un tronche pareille KarlyTacos, tu fais un AVC ou un truc du genre ?
Parce que lui, il ne sait pas ce qu’il faut faire en cas d’AVC…
- Ta mère ? Non, c’était un mec un peu dodu et...
Quelle potion ? Ses sourcils s’envolent, Keon referme l’ecrin parce que c’était clairement pas la réaction qu’il attendait. Non, il espérait plutôt un truc comme par exemple : “Waw trop beau, t’as bon goût, elle va être heureuse ta petite femme !”
Et là c’est littéralement le drame pour le pauvre Keon, il voit Karl flancher, littéralement. Le gaillard tente de le retenir, mais maigre comme il est, aucune chance !
- Jeez tu fais ton poids, moins de Tacos, Tabarnak !
Se défendit-il en essayant d’accompagner au mieux Karl jusqu’au sol pour qu’il ne se fasse pas de mal. Bien sur, on est à Los Angeles et personne ne s’arrête ! Keon finit par hurler qu’il a besoin d’aide, assez fort pour que l’on daigne donner un coup de main, ce fut l’adolescent aux bds qui rappliqua. Keon décide de gifler le pauvre pauvre Karl pour que celui-ci reprenne connaissance. Son regard glisse vers l’adolescent qui derrière son inquiétude, Keon semble voir une certain satisfaction de voir le régent se faire gracieusement baffer.
- Hey ! Ouvre les yeux !
Lui dit-il en le voyant froncer les sourcils, ne contrôlant pas son élan pour une dernière claque sur la joue de l’homme, un mal parfaitement inutile…
- P-pardon… L’adrénaline… Ça va ?
Avec le gamin, ils l’aident à s’asseoir, même si être ainsi en pleine rue passante, c’est pas le top, au moins ça évitera de se faire piétiner la boîte crânienne.
- Tiens, j’ai… J’ai de l’eau.
Il fouille dans son sac à côté des tacos pour finalement mettre la main sur une canette de soda, un petit luxe qu’il cède cependant sans bouder à l’homme qui en avait bien plus besoin que lui. Keon lève les yeux vers l’adolescent, cherchant vainement une possible réponse. - J’comprend pas c’qui s’est passé… P’t’être la ménopause ?
Il a entendu parler de ça à la clinique où ils se sont rendu pour avorter de leur enfant, il sait que ça atteint les gens d’un certain âge, enfin à ce qu’il a brièvement entendu d’une femme qui se plaignait d’avoir des malaises ! L’adolescent à ses côtés pouffe de rire, le médium lui renvoie un sourire sans savoir pourquoi, parce que ce jeune triste ne semble pas rire bien souvent et que c’est beau à voir…
Parler de son fils à Keon, sembla soudainement si étrange à Karl. C'était comme si tout d'un coup, le sorcier prenait la pleine mesure de son rôle, bien qu'il ait eut quinze années pour s'en acclimater. Alors, pourquoi dit comme ça, les mots revêtaient un tout autre sens ? Pourquoi soudainement ça sonnait si faux, plus encore face à quelqu'un comme Keon ? – un ami en somme, ou ce qui y ressemblait – Puis il faut dire que le jeune Nathan, ne rendait pas les choses faciles en choisissant délibérément la distance à la confrontation. Une attitude que Fitz ne pouvait lui reprocher après tout ce que l'adolescent venait de vivre. Il avait besoin de temps et de distance, alors il fallait s'en accoutumer. Que pouvait-il faire de plus de toute façon ? Toutefois, le sorcier aux prises avec sa réflexion, n'avait pas remarqué le trouble du médium, ni tout ce qui fulminait dans sa caboche. Karl n'avait pas la science infuse, il est vrai, il était donc loin de se douter que le petit cœur de Keon, avait lui aussi traversé quelques épreuves et que (sûrement) par fierté, il n'en ferait pas étalage aussi facilement. Toutefois, l'excentrique médium se transforma en physionomiste et chercha du regard, le potentiel rejeton Fitzgerald. Une tâche bien ardue sans informations complémentaires et qui faisait de tous les garçons présents aux alentours, des candidats potentiels. Keke jeta donc son dévolu sur ce qui ressemblait à un petit garçon édenté, ce qui fit bien rire le régent qui dans un souci de clairvoyance, agrémenta la description de quelques détails dont celui d'une funeste disparition qui laissa paraître dans le regard du médium (en plus de la gêne) de la tristesse. « - Non, ne le soit pas, tu ne pouvais pas savoir. Et puis c'est pour lui que c'est plus difficile, car il vivait avec sa mère depuis le divorce et on ne peut pas dire que j'ai été très présent dans sa vie. » Il parlait, mais il parlait trop et s'agaçait de se répandre de la sorte sur une affaire aussi privée. Mais il était déjà trop tard pour se reprendre, sauf bien sûr si le sorcier se laissait aller à la facilité en lançant un sort d'amnésie à son comparse. Bien que l'idée ait germé dans un coin de sa tête, ce n'était pas ainsi que Karl Fitzgerald agissait, du moins pas sur les autres.
De concert, ils posèrent leur regard bienveillant sur Nathan, qui continuait à lire sa bande-dessinée. Il paraissait détendu, plus qu'il ne l'était ces derniers temps, ce qui fit plaisir à Karl, aussi éphémère soit l'accalmie. Puis le régent de Red-House surprit par la confession de son jeune ami, reporta l'azur insondable de son regard sur ce pauvre Keon, dont finalement, il ne savait que peu de choses. « - Cette fois, c'est moi qui suis désolé. J'espère ne pas éveiller en toi de vieilles douleurs. La perte d'une mère est certainement l'une des pires épreuves de la vie. J'ai perdu la mienne, j'avais vingt-ans à peine et ça continue à me hanter. » La potion, efficace de surcroît, continuait à bloquer les émotions du régent, ce qui rendait l'échange étrange, tant le sorcier semblait distant et froid en évoquant « la pire épreuve de sa vie » Par chance, la légèreté (incertaine malgré tout) reprit vite le dessus en évoquant cette sortie improvisée dont Fitz se félicitait, mais tout demeurait relatif et il savait qu'une simple sortie au centre-commercial n'allait rien arranger et encore moins mettre un terme au deuil d'une mère. Le médium ne s'en offusqua point, il était excentrique, mais avant tout gentil et ne semblait pas être de ceux qui jettent la pierre. Délestant la présentation sommaire d'un Nathan distant et une discussion autour des tacos, l'ami Kéké titilla ensuite la curiosité de son nouvel ami avant de sortir un étain de sa poche, ce qui fit rire l'intéressé qui n'hésita, une fois n'est pas coutume, à charrier le médium. « - Hum…. J'ai sauté le pas une fois et l'on ne peut pas dire que cela m'ait réussi. Tentes ta chance avec Violet, c'est plus sûr ! » Rien ne laissait à présager que cet échange conduirait Karl, après avoir vu la fameuse bague, à perdre connaissance. Il aurait pourtant préféré se reprendre avant que la défaillance ne soit visible, arguer une fatigue avancée ou un amoncellement de travail dû à sa fonction. Il aurait pu prétendre avoir mangé un truc pas frais ou ingérer une potion qui inhibait chacune de ses émotions – mais pas les plus fortes de toutes évidences – Oui Karl aurait pu se trouver tout un tas d'excuses, si d'aventure, il avait déjà commencé par accepter son problème. Il ne se vit pas perdre connaissance et tomber malgré l'effort de Keon pour le retenir. Il ne vit pas non plus Nathan rappliquer et se satisfaire, sur le moment, de voir le médium coller quelques claques à ce « père indigne » Il ne vit pas l'inquiétude qui prenait vie dans le regard de Nathan à mesure que les minutes défilaient. Dans l'adversité, une certaine complicité naquit entre l'adolescent et l'excentrique médium. « J'le déteste, mais j'veux pas qu'il meurt quand même » Une phrase prononcée avec sincérité et qu'une fois encore, Karl ne put se résoudre à entendre. Par chance, puisqu'il en subsiste, un sorcier du coven reconnu son régent et accouru à sa rescousse en affublant Keon d'un regard qui en disait long sur le ressentit du nouvel arrivant. Karl fut rapidement pris en charge tandis que Nathan se décida à rester avec l'ami Keke. Et c'est ainsi qu'ils se séparèrent…
Plusieurs jours s'écoulèrent, une façon non-originale pour annoncer l'ellipse à venir. Et il fallait au moins ça pour se remettre. Karl avait passé quelques heures à l'hôpital avant d'être gardé une nuit entière en observation. Officiellement, il était question d'un black-out engendré par un surplus de travail. Officieusement, il était question d'un mauvais dosage dans la potion et d'une émotion trop forte pour être contenue. Le médecin, qui était aussi accessoirement un sorcier (sans coven) s'était ainsi occupé de ce patient vip. Après tout, ce n'est pas tous les jours qu'un régent est hospitalisé. Mais dans un souci de préservation, plus encore pour ne pas ébranler la réputation du coven et celle de son dirigeant, l'on demanda aux quelques sorciers témoins, de ne rien dire. C'est tellement plus facile de faire semblant et pourtant, parfois, il faut se confronter à la réalité et cessé d'ingurgiter des potions pour amoindrir sa peine, sa tristesse ou sa détresse. La semaine qui s'était annoncée fut riche en émotion. Entre le retour d'Arthur Fitzgerald, le patriarche et la levée du sort qui tenait éloignés Karl et Lyanna depuis plus de vingt-ans, le régent de Red-House n'avait pas chaumé. Il pouvait au moins se satisfaire d'avoir mis un terme à son accoutumance tout en ayant pris le temps de revoir Lyanna une seconde fois, sans haine, sans hostilité aucune, juste deux adolescents qu'ils n'étaient plus, mais qui s'aimaient encore intensément. La relation avec Nathan n'était toujours pas au beau fixe, mais il y avait du mieux, assez pour oser espérer une marge de progrès conséquente à l'avenir. Malgré tout, il restait encore une inconnue dans l'équation. Enfin un si l'on se focalise sur le propriétaire de cette bague à l'origine de l'évanouissement du sorcier. Si la bague avait appelé Keon, de toute évidence, elle avait hurlé aux oreilles de Fitz. Cette bague appartenait à sa mère et il devait en avoir le cœur net. Armé de son portable, il se risqua à chercher Keon dans son répertoire avant de se ravier et d'opter finalement pour un sms.
Salut, c'est Karl ! Je sais qu'il s'est presque écoulé une semaine. J'aurai dû t'appeler, ou te donner des nouvelles avant. Mais rassure-toi frère de tacos, je vais bien, mieux que l'autre fois. J'aimerais qu'on se revoie près du stand de tacos. Je songe à en faire notre QG d'ailleurs. S'il te plaît, pourrais-tu apporter la bague avec toi ? Je sais, c'est étrange, mais je crois qu'une histoire commune nous lie elle et moi. Aujourd'hui, dans l'après-midi, ça t'irais ?
Karytacos
Il effaça son message, du moins une partie, recommença la rédaction avant de finalement écrire la même chose et de se convaincre qu'il était temps de presser la bonne touche. Et c'est ce qu'il fit, attendant patiemment la réponse de l'aficionados de tacos.
Keon a l’impression d’entrer dans la vie privée de Karl en parlant de cet enfant duquel il semble être difficilement proche, de la mère décédée. Un drame. Le médium ne relève pas au sujet de l’absence d’un père, il n’a jamais connu le sien, il ne sait pas quel genre de manque ça peut provoquer. Keon était attaché à sa mère, il l’aimait, aussi junkie fut-elle. Alors il comprends que trop la tristesse de l’adolescent, le vide qu’il doit ressentir… Keon décida de livrer cette part triste de son histoire, une histoire qui n’est qu’une succession de malheurs de ce genre. Mais autant être quitte, car même s’il connaît peu le sorcier, il sait déceler les signes de malaise. Foutu empathie n’est-ce pas ?
- Non tu n’as rien éveillé, cette douleur là ne s’endort jamais.
Assure Keon pour réconforter l’homme bien que ce soit particulièrement déprimant comme propos. Le vide est toujours là, il a essayé de combler ça avec l’alcool, la drogue, les morsures, l’amour… Mais c’est toujours là quelque part, il faut juste vivre avec. Il eut un regard tendre pour Fitz’ car il se doute que celui-ci souffre toujours de l’absence de sa mère. POur changer de sujet, il décide de lui montrer la bague, persuadé de partir sur une touche positive loin des souvenirs tristes qui hantent le régent.
Cependant n’a pas idée de savoir à quel point il est sur le point de s'immiscer dans les affaires personnel du régent avec cette bague. Lui était heureux de son achat, il se trouvait à des années lumières de penser à ce qui allait suivre. Et soutenir Karl fut un pitoyable échec pour ses bras maigrichons. S’il peut porter sa femme, la petite crevette blonde, il ne pouvait pas faire le poids face à un steak comme Karl !
Ses claques s’avèrent inefficaces, il relève ses yeux bruns vers Nathan alors qu’une sorcier le fit déguerpir pour s’occuper de son régent. Keon ne dit rien, se mettre les sorciers à dos ce n’est pas une bonne option. Il observe la scène où Karl fut évacué des lieux, le médium fut surpris de constater que Nathan était resté à ses côtés. Il avait clairement entendu la phrase de l’adolescent alors il lui dit avec un demi sourire.
- Je suis sûr qu’il va s’en remettre, j’sais reconnaître un type trop têtu pour mourir.
Il referme l'écrin et range la bague dans sa poche, se rendant compte qu’il aurait pu la perdre dans tout ça ! Cela aurait été une pure catastrophe ! Heureusement, il n’en était rien et il la mit en sécurité avec empressement avant de demander au mioche.
- T’as déjà entendu parler d’un truc qui s’appelle : World of Warcraft ?
La regard de Nathan semble s’illuminer et c’est comme ça que Keon et lui eurent une bien longue conversation avant que le médium n’accompagne le jeune homme jusqu’à l’endroit où le gamin avait dit qu’il serait en sûreté. Bien obligé de le croire. Un peu inquiet malgré tout pour Karl, Keon rentra chez lui avec une certaine anxiété et cacha la bague le lendemain chez Amarante.
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Il aurait pu prendre l’initiative d’envoyer un sms à Karl, mais il n’a jamais osé le déranger. Il se doute que le régent va bien, sinon les sorciers du Coven seraient venu chercher des explications. Le médium reprit son travail, il traverse le sevrage comme il le peut sans se souvenir des détails des circonstances de ce sortilèges.
Keon hésite longuement, puis répondit au message. “ D’accord, vers 17h. ”
Keon n’a pas été véritablement à l’école, même écrire des sms lui demande pas mal de temps, alors il a l’habitude de faire court, surtout quand il s’apprête à voir la personne dans quelques heures. Par la suite il efface leur bref échange. Certes avec Violet ils avaient promis de ne plus avoir de secret, mais la bague est une surprise !
Le médium se rend donc chez Amarante pour récupérer sa bague, puis il prit le chemin en direction du stand de tacos. Keon est bien moins fatigué, moins maigre, il est en assez bonne santé, s’améliorant de semaine en semaine ! Jamais il n’a fait autant de progrès et aussi rapidement, pas une goutte d’alcool, ça y joue beaucoup dans son processus.
Une fois sur place, le médium est un peu nerveux. Quelques esprits ont fait le chemin avec lui, sans réellement l’embêter. Keon sent un lien très fort entre la bague et… Lui ? Il n’en sait rien. Mais il ne comprend pas ce qu’il se passe au sujet de ce bijou, il est anxieux concernant la suite, mais il tente de faire confiance en Karl.
Quand il pu voir celui-ci le médium lui adresse un sourire amical en s’approchant. C’est vrai que le sorcier semble lui aussi en meilleure forme. - Au moins t’es pas par terre cette fois !
Lui lance gentiment Keon en lui donnant une petite tape sur son épaule, bien que sa main resta sur l’épaule de ce dernier pour lui tâter le biceps sans la moindre gêne. Keon et sa maigre conception de la pudeur.
Il ne s’attarde pas trop dans son geste, même s’il est ravi de revoir son élève bien aimé en terme de Tacos, il ne peut vraiment contenir l'inquiétude qui le ronge.
- Ecoute je… J’ai apporté la bague. Mais tu sais j’compte l’offrir à Violet…
Keon ne sait pas vraiment ce qu’il ressent tout est confus et il a ses heures de travail dans ses pattes, il devrait prendre le temps de se calmer, mais il a besoin de tirer cette affaire au clair, cette bague commence à devenir bien trop mystérieuse et il tient à ce que tout soit parfait pour son épouse qui a ses yeux, mérite le monde.
- En plus regarde, le stand est fermé aujourd'hui !
Qu'il ajoute théâtralement, pour tenter de détendre l’atmosphère, bien qu'il soit persuadé d'être le seul à être tendu. Dans le fond, il a un peu trop peur de comprendre de quoi il en retourne autour de cette bague.
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