Cela faisait trois semaines que Bodicae vivait chez Richard et chez Rose, la petite blonde avait repris un peu de poids et toutes ses blessures physiques étaient guéries, mais mentalement c’était une autre paire de manche. La sirène était perdue, que se soit sur terre ou dans la mer on l’avait blessé. Dica avait l’impression de n’être en sécurité nulle part, elle tolérait Rose et Richard, mais elle n’arrivait pas encore à leur faire confiance. Elle n’était pas certaine de pouvoir faire confiance à quiconque un jour. Tout l’effrayait, alors quand un collègue à Richard avait débarqué sans prévenir, elle avait filé se cacher. Cela faisait une heure qu’elle était cachée sous son lit, ce lit ou elle ne dormait jamais, cela lui rappelait trop de mauvais souvenir d’hommes nus lui faisant du mal. Mais en dessous du lit c’était différent, c’était une bonne cachette et elle seule était assez menue pour s’y cacher.
Les yeux bleus de la petite sirène, observait l’horizon, Dica était immobile et silencieuse comme une image, même sa respiration était presque inaudible. La blonde ne comptait pas sortir de sa cachette, pas tant qu’elle ne serait pas certaine que l’homme inconnu soit parti. L’adolescente était patiente, quand elle vivait dans l’eau elle avait appris à chasser et même si elle était pitoyable, elle n’attrapait jamais rien, elle avait appris à se cacher et à rester silencieuse pour guetter sa proie. Sous la mer, elle faisait toujours partie des dernières à se nourrir, elle n’était qu’une oméga, une moins que rien. Sur terre elle avait cru un moment avec sa mère que sa place serait différente, elle pensait avoir des amis, puis on l’avait capturé et elle était devenu pire qu’une oméga, elle était devenue une esclave.
Dica n’allait pas sortir, mais elle avait faim, vraiment faim, son ventre commençait à gargouiller. Elle aurait aimé qu’il se taise et si l’inconnu la retrouvait à cause du bruit ? Et s’il la kidnappait ? C’était effrayant, elle détestait les inconnus, mais le monde en était empli, c’était terrifiant, comment allait-elle faire pour survivre ? Elle avait tellement peur que l’enfer recommence, qu’on lui remette le collier de fer, celui qui faisait mal. Elle avait si peur qu’elle ferma les yeux.

Fermer les yeux avait quelque chose de curieusement apaisant, contrairement à la majorité Dica n’avait pas peur du noir. Dans le noir on pouvait toujours se cacher, c’était dans la lumière qu’il n’y avait nulle fuite. Elle se rappelait des soirées pleine de lumière qui l’empêchait de dormir et qui lui agressait les yeux. Tant de lumières et tant de bruit, boom, boom, boom, boom et tout ses rires. Pourquoi ils rigolaient ? Il n’y avait rien de drôle, elle n’avait jamais compris la cruauté gratuite dont elle avait été victime. Sous la mer elle comprenait, on était jalouse d’elle, elle était le seul bébé viable de l’alpha, une concurrente, mais sur terre qu’avait-elle fait ? Une odeur vient lui chatouillait les narines, elle renifla plus fort pour reconnaitre l’odeur, c’étaient des gaufres, elle en était certaine. Les gaufres c’étaient trop bon, meilleur que le poisson même. Elle entendit une personne entrer dans la pièce et elle ouvrit les yeux se préparant à se défendre en cas où, puis elle reconnut les chaussures c’était celle de Richard. Sa voix se fit entendre également, il était venu avec une offrande. Il posa les gaufres à un mètres du lit, elle tendit son bras, mais il était trop petit. Son cœur battait fort, elle avait peur, mais en même temps il était là, il lui parlait souvent, elle comprenait quelques mots comme « gaufre ». Richard ne lui avait jamais fait de mal alors elle prit son courage à deux mains et elle sortit de sa cachette, elle attrapa les gaufres en observant prudemment les alentours. Elle reposa les gaufres et attrapa son carnet qui était resté sous le lit. Elle écrivit « Thank U » un des rares mots anglais qu’elle avait appris à écrire, elle l’accompagna avec un petit cœur, c’était Motoko qui lui avait expliqué ce que cela voulait dire. Elle déchira la page et l’offrit à Richard, puis elle se jeta sur la glace parce qu’elle risquait de fondre et que c’était moins bon fondu. Quand elle eut terminé, elle reprit son carnet et elle dessina une brique de lait au chocolat. Elle montra le dessin et se montra, le message était clair, pour elle en tout cas.

Dica était affamée, mais Dica avait aussi toujours faim. Elle mangeait pour trois au moins, comme pour rattraper ses longs mois de privation. En effet il arrivait parfois qu’on oublie de la nourrir et quand on y pensait ce n’était pas toujours très bon. Il fallait la rendre en état alors elle n’avait jamais été sur le point de mourir de faim, mais allez donner à une sirènes une boite de sardine alors qu’elle les pêchait fraiche dans l’océan, autant dire que ça passait mal. Certain de ses repas l’avait même rendu malade, son estomac n’étant pas habitué à tant de gras. Etrangement elle s’était cependant bien vite accoutumée au sucre, mais il fallait quand même éviter qu’elle n’en mange trop. Son médecin aurait probablement rouspété Richard s’il avait vu l’offrande, mais c’était ce dernier qui devait la gérer dans la vie de tous les jours, pas le toubib, il ne pouvait pas comprendre à quel point elle était sauvage et à quel point l’amadouer n’était pas facile. Richard lui parla en japonais, il faisait cet effort pour elle et c’était une des raisons pour laquelle elle le rangeait dans la catégorie des « personnes peut être digne de confiance ». Son dessin fut compris, Richard disparut et elle se jeta sur sa gaufre, elle aimait tellement ça. Croquant, moelleux, sucré à la fois, une explosion de saveur sous son petit palais. Richard revint avec la briquette de lait tant désiré, Dica l’attrapa pour en boire une gorgée. L’homme brun lui posa une question, Dica ne parlait pas beaucoup anglais, mais elle était intelligente et elle apprenait vite. Elle opina du chef, symbole universel pour dire oui que se soit ici, au Japon, en Chine ou en Russie, puis elle désigna Richard du doigt pour lui retourner la question. Elle posa sa briquette et repris son carnet, elle dessina un portrait de l’inconnu qui était venu, son dessin était incroyable de détail presque photographique, elle ajouta un ? symbole qui existait aussi en Russie. Elle arracha la page et la donna à Richard. Elle voulait savoir qui il était, pouvait-elle lui faire confiance ou pas.